IIe RÉUNION PLÉNIÈRE DE LA COMMISSION MIXTE DU DIALOGUE THEOLOGIQUE ENTRE L'EGLISE ORTHODOXE ET LES ÉGLISES ORIENTALES ORTHODOXES

La IIe réunion plénière de la Commission mixte du dialogue théologique entre l'Église orthodoxe et les Églises orientales orthodoxes a eu lieu au monastère Amba Bishoï, Wadi-EI­Natroun en Égypte, du 20 au 24 juin 1989.

Des représentants officiels des deux familles d'Églises se sont réunis pendant quatre jours dans une atmosphère de chaleureuse cordialité et de fraternité chrétienne en la maison réservée aux invités de la résidence patriarcale dans ce même monastère, et ont apprécié l'hospitalité généreuse et la sollicitude du pape et patriarche copte d'Alexandrie Shé­nouda et de son Église.

Sa Sainteté le pape et patriarche Shénouda a prononcé une allocution à la séance inaugurale de la réunion et a invité les participants à trouver le moyen de restaurer la communion entre les deux familles d'Églises en dialogue. Les participants sont allés au Caire pour écouter l'homélie que le pape Shénouda adresse chaque semaine à des milliers de fidèles dans la grande cathédrale de la ville. Plus tard, le pape Shénouda a reçu les délégués dans sa résidence.

Les vingt-trois délégués venaient de treize pays et représentaient treize Églises. Le thème principal des discussions était le rapport de la sous-commission mixte composée de six théologiens sur les problèmes de terminologie et d'interprétation actuelle des dogmes christologiques. Les séances étaient co-présidées par Son Eminence le métropolite Damaskinos de Suisse et Sa Grâce l'évêque Bishoï de Damiet­te.

 

Allocution du Pape Chénouda III :

« Nous nous sommes réunis ici pour examiner la question de la christologie que nous avons pu résoudre si facilement avec les catholiques et pour laquelle nous avons convenu d'une formulation de foi acceptée des deux côtés. Le problème est que le terme « monophysites » est une fausse interprétation qui causa tant de difficultés durant des générations.

 Nous croyons en notre Seigneur Dieu et Sauveur Jésus-Christ, parfait dans sa divinité et parfait dans son humanité. Il a assemblé sa divinité et son humanité en un tout sans confusion, ni altération, ni séparation et nous ne parlons pas de deux natures après cette union mystérieuse de notre Seigneur.

 Depuis des générations, nos Églises croient en la divinité et en l'humanité de notre Seigneur. Par exemple quand nous disons de saint Athanase d'Alexan­drie, qu'il était le héros de la foi ayant défendu la divinité de notre Seigneur contre l'Arianisme. En même temps, il a expliqué l'humanité de notre Seigneur dans son fameux ouvrage "L'incarnation du Logos".Ainsi ce Père de l'Église parla de la divinité et de l'humanité de notre Seigneur. Quand nous parlons d'une nature, nous ne parlons pas d'une divinité seule ni non plus d'une humanité seule, mais quand nous parlons de son unique nature, dans notre esprit cela signifie la nature du Logos incréé.

 Comme disait notre Père commun saint Cyrille d'Alexandrie "Mia Physis tou Theou Logou sesarkomené" nous disons que dans l'homme, dans chaque homme, il y a deux natures unies ensemble dans une nature, esprit et chair. Quand nous parlons de deux natures des êtres humains, nous n'entendons pas esprit seul ou chair seule, nous entendons nature humaine.

En même temps, nous anathémisons la doctrine et les enseignements aussi bien de Nestorius et d'Eutychès.

Si nous croyons que notre Seigneur est parfait dans sa divinité et parfait dans son humanité, cela signifie que nous croyons en Lui comme au Dieu Homme ou Dieu manifesté dans la chair, comme il est mentionné dans la première épître de saint Paul à Timothée, chapitre 3, 16.

Comme il ne s'agit que d'une question de linguistique ou de terminologie, nous pouvons trouver une formulation de foi qui soit acceptée par les deux familles. Je pense qu'il y a plusieurs problèmes sérieux qui sont apparus dans le monde chrétien, qui ne sont pas moindres que celui de Chalcédoine. Si nous pouvons être un, le monde de l'Orthodoxie pourra être plus fort et solide pour affronter de tels problèmes sérieux.

 Par exemple, nous pouvons travailler ensemble contre les témoins de Jéhovah, les Adventistes dispersés dans plusieurs pays et qui sont contre le Credo et la foi chrétiens. Nous pouvons travailler ensemble pour affronter ce qu'on appelle la nouvelle théologie, qui ne prend en considération que certains passages de la Bible en tant que théologie nouvelle. Nous pouvons aussi faire face à de nombreux autres problèmes comme l'ordination des femmes pour laquelle certains essaient de manipuler le sens et même l'interprétation de la sainte Bible. Les gens qui parlent de droits des femmes posent quelquefois sérieusement la question sur Dieu Lui-même, s'il est un père ou une mère, et ils essaient de donner une autre interprétation de la sainte Bible pour supprimer le mot Père; je note dans certaines prières du Conseil œcuménique des Églises qu'au lieu de dire notre Père qui êtes aux Cieux, on voudrait dire notre parent qui êtes aux Cieux, changer le mot Père; et ce mot se trouve plusieurs fois dans les Évangiles. Ils veulent changer tout cela, et même le mot Fils. Il y a actuellement plusieurs personnes qui ne respectent pas la sainte Bible. Elles essaient d'utiliser les versets de la Bible pour maintenir leur propre compréhension du texte. Je pense que nous devons avoir le courage d'affronter ces problèmes, et ne pas utiliser tout notre temps à trouver des solutions à quelque problème linguistique sur la christologie, du moment que nous tous croyons en la parfaite divinité et en la parfaite humanité de notre Seigneur .

 Le monde entier attend que l'Orthodoxie fasse quelque chose contre tant d'hérésies répandues dans le monde, pour la liberté et son sens, contre l'immoralité, l'homosexualité et ce qu'on appelle des prêtres thaumaturges, contre l'ordination à la prêtrise d'homosexuels ...

 Permettez-moi de dire qu'en Orient, dans les pays non chrétiens, de telles choses qui se passent en Occident donnent une mauvaise réputation au christianisme. Ces pays ne font pas de différence entre Orient et Occident. Il y a même certaines Églises qui pourraient admettre la polygamie dans le but d’intégrer certains groupes dans leur sein et d'autres qui permettraient des mariages mixtes dans l'Église avec des non-chrétiens et dont les enfants ne seraient pas baptisés. Le monde entier demande que quelque chose soit fait, de ne pas consacrer tout son temps à un seul problème et de ne pas prendre autant d'années à résoudre ce problème.

 Quand je vois qu'il nous a fallu quatre ou cinq ans avant de pouvoir réunir cette assemblée, je ne sais pas combien il nous faudra attendre, combien d'autres années encore pour une autre sous-commission ou une autre commission pour compléter nos discussions. Je ne sais même pas si cela aura lieu dans notre génération ou dans une autre. Donc, je suggère que nous travaillions pour finir nos discussions dans les plus brefs délais et que nous n'attendions pas des années et des années. Je me permets aussi de poser un autre problème : plusieurs chrétiens se convertissent à d'autres religions, même en Europe et en Amérique. En Amérique il y a même une Église nommée Église du diable. 

 Si le monde orthodoxe pouvait s'unir, affronter tous ces problèmes et coopérer, nous pourrions atteindre de bons résultats, expliquer la vraie théologie, les vrais dogmes, la vraie exégèse de la Bible et nous ne prendrions pas tant d'années à discuter les malentendus du mot "monophysites".

Nous croyons en la divinité de notre Seigneur, en l'humanité de notre Seigneur, parfait dans sa divinité et parfait dans son humanité. Nous croyons que la sainte Vierge Marie est "Théotokos", la Mère de Dieu.

 Je prie pour le succès de votre réunion. (...) Je vous remercie tous d'être venus pour participer à cette réunion.

 

Réponse du co-président orthodoxe de la Commission mixte, le métropolite Damaskinos de Suisse :

"Sainteté, c'est avec une émotion et une gratitude particulières que je rappelle à ma mémoire notre dernière rencontre (inoubliable pour moi) en ce saint lieu, au cours de la période pascale de l'année 1985, lorsque, en compagnie du professeur Vlassios Phidas, j'étais venu comme envoyé de Sa Sainteté le patriarche oecuméni­que Dimitrios 1er afin de contribuer - avec l'assentiment des autres chefs de vos Églises ­ au progrès plus intensif du dialogue officiel entre nos Églises.

 La IIIe Conférence panorthodoxe préconci­liaire salue avec grande satisfaction l'ouverture récente de ce dialogue et se réjouit du choix de la christologie comme premier thème à exami­ner.

Les perspectives de ce dialogue laissent espérer avec raison que des solutions seront trouvées en commun aux questions concernant l' " horos " du IVe Concile oecuménique, en étroit rapport également avec les décisions christolo­giques des autres Conciles oecuméniques, et les moyens menant à l'acceptation des IVe, Ve, VIe et VIIe Conciles oecuméniques, à la levée des anathèmes prononcés de part et d'autre, etc. Quoi qu'il en soit, le dialogue en question serait renforcé si on étudiait et cherchait à résoudre les problèmes pastoraux communs, les deux familles d'Églises vivant dans un même milieu et ayant des présupposés ecclésiaux communs: deux éléments qui peuvent contribuer à la solution de ces problèmes.

 C'est avec joie que nous avons pu constater en vous écoutant que Votre Sainteté a cerné des problèmes concrets, pastoraux et autres, qui demandent à être affrontés et résolus en commun de manière responsable.

Il n'est pas nécessaire de rappeler ici une fois de plus que le devoir de faire avancer l'unité s'est aujourd'hui répandu dans un cercle très large de théologiens orthodoxes qui constatent l'unité essentielle dans la foi christo­logique de nos Églises. Cette constatation - ou plutôt cette conviction - se répand de plus en plus, je le répète, parmi nos théologiens. C'est ainsi, par exemple, que deux théologiens ortho­doxes avaient pu écrire dans un " Appel" qu'ils avaient lancé à l'Église en vue du futur saint et grand Concile de l'Église orthodoxe:

" Une réparation urgente s'impose concernant les anciennes Églises orientales. Après trois rencontres entièrement positives entre théolo­giens, l'unité fondamentale de foi ne fait plus de doute. Il a suffi pour cela de retrouver la commune inspiration patristique et de replacer Chalcédoine dans la dialectique entière de l'histoire de l'Église. Il importe maintenant de secouer les inerties historiques pour poser sans tarder des actes d'union qui consacreront la présence de l'orthodoxie jusque dans les profondeurs de l'Afrique et de l'Asie" (P. Evdokimov - O. Clément, Vers le Concile. Appel à l'Église, in Contacts 23 (1971), nos 73-74).

Je désire de même relever le fait que le rapprochement entre les deux Églises constitue aussi une nécessité historique, ainsi que cela a été souligné par leurs représentants respectifs, dans le cadre du Moyen-Orient arabe en 1972 : " Les Églises orthodoxes et les anciennes Églises orientales réalisant dans l'Orient arabe la distance qui les séparait depuis le Ve siècle, malgré leur attachement à une même confes­sion, ont senti le besoin de se rencontrer pour étudier les moyens de surmonter les obstacles qui, jusqu'à présent, ont empêché l'unité complète entre elles. Puisqu'elles vivent dans la même réalité historique et sont confrontées aux mêmes problèmes temporels et spirituels, elles sont convaincues qu'une responsabilité commune les appelle à être unies dans le témoignage et le service, dépassant les différences de langage et les obstacles historiques qui les avaient séparées dans le passé " (Epis­kepsis, 14.3.1972, n° 50, p. 5).

Vous vous êtes référé, Sainteté, à la théologie - que nous partageons - de Cyrille d'Alexandrie concernant " une seule nature du Dieu Verbe incarné ".

Nous souhaitons et nous prions pour que son humilité et son sens élevé de responsabilité puissent nous servir d'exemple. Car il n'a pas insisté sur la priorité de sa propre théologie - pourtant si admirable ­dans l'espoir de se réconcilier en 433 avec Jean d'Antioche, après qu'il eût été convaincu qu'au ­delà des différences, leur foi était identique.

Bien sûr, je ne prétends pas que nous devrions renoncer de part et d'autre aux formulations théologiques qui nous sont propres - dans la mesure notamment où elles sont acceptables ­ou aux différents us et coutumes locaux qui souvent enrichissent la tradition commune de notre foi, unique dans son essence, et cela afin d'arriver au plus vite à restaurer la pleine communion entre nos Églises. Sur ce point je souhaite que nous soyons inspirés dans le travail responsable que nous entreprenons par la tradition de l'Église d'Alexandrie et notam­ment par l'attitude et l' " ethos " d'Athanase d'Alexandrie qui savait mettre les mots ­toujours secondaires par rapport aux choses ­au service de l'expression de l'essence des choses qui, elle, a toujours la priorité. Et l'essence, dans ce contexte, est une: la recherche commune des conditions qui nous conduiront - si Dieu le veut et avec la bénédiction de Votre Sainteté et des Églises que nous représentons ici - à la restauration tant désirée de la pleine communion entre nous afin que nous puissions contribuer avec plus de crédibilité au dépassement de la séparation entre l'Orient et l'Occident. Le monde chrétien tel qu'il est, c'est-à-dire séparé, présente une situation qui n'est pas normale, une plaie dans le Corps du Christ - une plaie qui doit être guérie selon Sa volonté qu'en toute humilité nous servons. Ainsi soit-il".

Un petit groupe de rédaction formé par le métropolite Paulos Mar Gregorios de New Delhi, le professeur Vlassios Phidas, le ré v. professeur Jean Romanides, le professeur Ivan Dimitrov et monsieur Joseph Moris Faltas rédigea une brève déclaration de foi basée sur le rapport de la sous-commission mixte, dans laquelle étaient exprimées les convictions christologiques communes des deux côtés. Cette déclaration, après quelques modifications, fut adoptée par la Commission mixte. Elle sera transmise à nos Églises pour être approuvée comme l'expression de notre foi commune sur le chemin vers la restauration de la pleine communion entre nos deux familles d'Églises.

                                                     

Déclaration approuvée

Nous avons hérité de nos pères en Christ l'unique foi et la tradition apostolique bien que, en tant qu'Églises, nous ayons été séparées pendant des siècles.

Comme deux familles d'Églises orthodoxes qui ne jouissent plus depuis longtemps de la communion réciproque nous prions maintenant Dieu en Qui nous mettons notre confiance, de restaurer cette communion sur la base de la commune foi apostolique de l'Église indivise des premiers siècles que nous confessons dans notre commun Credo.

Ce qui suit est une simple déclaration, rédigée dans un esprit de piété, de ce que nous croyons, toujours sur le chemin de la restauration de la communion entre nos deux familles d'Églises orthodoxes.

Tout au long de nos discussions nous avons trouvé notre terrain d'entente dans la formule de notre Père commun saint Cyrille d'Alexandrie : mia physis (hypostasis) tou Theou Logou semarkomené, ainsi que dans son affirmation qu'" il suffit pour la confession de notre vraie et irréprochable foi de dire et de confesser que la sainte Vierge est Théotokos " (Hom 15, cf. Ep. 39).

 Il est vraiment grand le merveilleux mystè­re du Père, du Fils et du Saint-Esprit : un seul vrai Dieu, une ousia en trois hypostases ou trois personnes. Que le nom du Seigneur notre Dieu soit béni pour toujours.

 Il est grand également le mystère ineffable de l'Incarnation de notre Seigneur Jésus-Christ pour nous et pour notre salut.

 Le Logos, éternellement consubstantiel avec le Père et le Saint-Esprit dans sa Divinité, est devenu chair dans les derniers jours par le Saint-Esprit et la bienheureuse Vierge Marie, la Théotokos, et est ainsi devenu homme, consubstantiel avec nous dans son humanité mais sans péché. Il est en même temps vrai Dieu et vrai Homme, parfait dans sa Divinité, parfait dans son Humanité. Du fait que celui qu'elle porta dans son sein était en même temps pleinement Dieu et pleinement humain nous appelons la bienheureuse Vierge Théotokos.

 Lorsque nous parlons de l'hypostase une et composite (synthetos) de notre Seigneur Jésus­Christ, nous ne voulons pas dire qu'en Lui s'unissent une hypostase divine et une hyposta­se humaine. Nous voulons dire que l'une et éternelle hypostase de la Deuxième Personne de la Trinité a assumé notre humaine nature créée, dans un acte l'unissant à sa propre divine nature incréée pour former ensemble un réel être divino-humain uni inséparablement et sans confusion, les natures étant distinguées l'une de l'autre uniquement dans la contempla­tion (theoria).

 L'hypostase du Logos avant l'incarnation n'est évidemment pas composite, ni même avec sa nature divine. La même hypostase, distincte de la nature, du Logos incarné n'est pas non plus composite. L'unique personne (prosopon) théandrique de Jésus-Christ est une hypostase éternelle qui a assumé la nature humaine dans l'Incarnation. C'est pour cela que nous appelons cette hypostase composite, en raison des natures qui sont unies afin de former une unité composite. Le vrai problème n'est pas de savoir si nos Pères utilisaient toujours les termes physis et hypostasis de manière inter­changeable et confondaient l'un avec l'autre. Car le terme hypostasis peut être utilisé pour désigner aussi bien la personne distincte de la nature que la personne avec la nature, car une hypostase n'existe en fait jamais sans une nature.

 C'est cette même hypostase de la Deuxième Personne de la Trinité, engendrée de toute éternité par le Père, qui, dans ces derniers jours, devint un être humain et naquit de la Vierge bienheureuse. C'est là le mystère de l'union hypostatique que nous confessons dans une humble adoration - l'union réelle du divin avec l'humain, avec tous les traits propres et toutes les fonctions de la divine nature incréée, y compris la volonté naturelle et l'énergie naturelle, unies inséparablement et sans confusion à la nature humaine créée avec tous ses traits propres et toutes ses fonctions, même la volonté naturelle et l'énergie naturelle. C'est le Logos incarné qui est le sujet de tout "vouloir" et de toute action de Jésus-Christ.

 Nous sommes d'accord pour condamner les hérésies nestorienne et euthychienne. Nous ne séparons ni ne divisons la nature humaine dans le Christ de Sa nature divine, et nous ne pensons pas non plus que la première ait été absorbée par la dernière et aurait ainsi cessé d'exister.

Les quatre expressions employées pour décrire le mystère de l'union hypostatique appartiennent à notre tradition commune ­sans confusion (asynchytôs), sans changement (atreptôs), sans séparation (achôristôs) et sans division (adiairetôs).

Ceux parmi nous qui parlent de deux natures dans le Christ ne nient pas par là leur inséparable et indivisible union ; ceux d'entre nous qui parlent d'une nature divino-humaine unie en Christ ne nient pas la présence dynamique continue en Christ du divin et de l'humain, sans changement ni confusion.

 Notre accord mutuel n'est pas limité à la christologie, mais embrasse toute la foi de l'Église une et indivisible des premiers siècles. Nous sommes d'accord également sur la façon de comprendre la Personne et l'Action de Dieu, le Saint-Esprit qui procède du Père seul, et est toujours adoré avec le Père et le Fils.

                                                                                                            

DEUXIÈME DÉCLARATION COMMUNE ET RECOMMANDATIONS AUX ÉGLISES 

Documents approuvés par la Commission mixte de dialogue théologique entre l'Église orthodoxe et les Églises orientales orthodoxes.

 

1. Les deux familles sont d'accord pour condamner l'hérésie eutychienne.

Toutes les deux confessent que le Logos, la deuxième Personne de la sainte Trinité, seul à être né du Père avant les siècles et consubstantiel à Lui, s'est incarné et est né de la Vierge Marie, la Théotokos; pleinement consubstantiel à nous, homme parfait avec une âme, un corps et une intelligence (noùs) ; Il a été crucifié, est mort, fut enterré et ressuscita des morts le troisième jour, monta vers le Père céleste, où Il est assis à la droite du même Père comme Seigneur de toute la Création. A la Pentecôte, par la venue de l'Esprit Saint, Il manifesta l'Église comme son Corps. Nous attendons sa deuxième venue dans la plénitude de sa gloire, conformément aux Écritures.

 2. Les deux familles condamnent l’hérésie nestorienne et le cryptonestorianisme de Théodoret de Cyrus. Elles sont d'accord qu'il n'est pas suffisant de dire simplement que le Christ est consubstantiel à son Père et à nous, Dieu par nature et Homme par nature ; il faut affirmer également que le Logos, Lequel est Dieu par nature, devint Homme par nature, par Son incarnation dans la pléni­tude du temps.

 3. Les deux familles acceptent que l'Hypostase du Logos devînt composite (suvqeto") en unissant à Sa nature divine incréée avec sa volonté et son énergie naturelles, qu'Il a en commun avec le Père et le Saint-Esprit, la nature humaine créée qu'Il assuma par l'incarnation et fit sienne avec sa volonté et énergie naturelles.

 4. Les deux familles acceptent que les natures, avec leurs propres énergies et volon­tés, sont unies hypostatiquement et naturelle­ment sans confusion, sans changement, sans division et sans séparation, et qu'elles sont distinguées seulement dans la pensée

 5. Les deux familles acceptent que Celui qui veut et agit est toujours l'unique Hypos­tase du Logos incarné.

 6. Les deux familles acceptent de rejeter les interprétations de conciles qui ne sont pas pleinement d'accord avec le Horos du Ille concile oecuménique et la lettre (433) de Cyrille d'Alexandrie à Jean d'Antioche.

  7. Les orthodoxes acceptent que les orientaux orthodoxes continuent à maintenir leur terminologie cyrillienne traditionnelle «une nature du Logos incarnée», puisqu'ils reconnaissent la double consubstantialité du logos niée par Eutychès. Les orthodoxes aussi utilisent cette terminologie. Les orientaux orthodoxes acceptent que les ortho­doxes emploient à juste titre la formule des deux natures, puisqu'ils reconnaissent que la distinction est « uniquement en pensée ».Cyrille interpréta correctement cet usage dans sa lettre à Jean d'Antioche et dans ses lettres à Acacius de Mélitène (PG 77, 184-201), à Euloge (PG 77, 224-228) et à Succensus (PG 77, 228-245).

 8. Les deux familles reçoivent les trois premiers conciles œcuméniques qui forment notre héritage commun. Quant aux quatre conciles ultérieurs de l'Église orthodoxe, les orthodoxes affirment que, pour eux, les points 1-7 susmentionnés sont aussi l'enseignement de ces quatre conciles ultérieurs, alors que les orientaux orthodoxes considèrent cette affirmation des orthodoxes comme leur propre interprétation. Dans ce sens, les orientaux orthodoxes répondent positivement à cette affirmation.

 Par rapport à l'enseignement du 7è concile œcuménique de l'Église orthodoxe. les orientaux orthodoxes acceptent que la théologie et la pratique de la vénération des icônes enseignées par ce concile soient en accord fondamental avec l'enseignement et la pratique des orientaux orthodoxes depuis les temps anciens, bien avant la convocation du concile, et qu'à cet égard il n'y a pas de désaccord entre nous.

9. A la lumière de notre déclaration com­mune sur la Christologie et des affirmations communes susmentionnées, nous avons maintenant clairement compris que nos deux familles ont toujours loyalement gardé la même et authentique foi christologique orthodoxe, et ont maintenu la continuité ininterrompue de la tradition apostolique, bien qu'elles aient pu utiliser des termes christologiques de manière différente. C'est cette foi commune et cette loyauté continuelle à la tradition apostolique qui doivent être la base de notre unité et communion.

 10. Les deux familles reconnaissent que tous les anathèmes et les condamnations du passé qui maintenant nous divisent doivent être levés par les églises pour que le dernier obstacle à la pleine unité en communion de nos deux familles puisse être ôté par la grâce et la puissance de Dieu. Les deux familles acceptent que la levée des anathèmes et des condamnations sera basée sur le fait que les conciles et les Pères précédemment ana­thématisés ou condamnés ne sont pas hérétiques.

 

Nous recommandons donc à nos églises les démarches pratiques suivantes : 

a) Les orthodoxes devront lever tous les anathèmes et les condamnations contre tous les conciles et les Pères orientaux qu'ils ont prononcés dans le passé.

b) Les orthodoxes orientaux devront simultanément lever tous les anathèmes et les condamnations contre tous les conciles et les Pères orthodoxes qu'ils ont prononcés dans le passé.

c) La manière selon laquelle les anathèmes auront à être levés doit être décidée par les églises individuellement.

 

Confiants en la puissance du Saint-Esprit, l'Esprit de vérité, d'unité et d'amour, nous soumettons cette déclaration commune et ces recommandations à nos vénérables églises pour examen et suite conséquente, priant pour que ce même Esprit nous conduise à l'unité pour laquelle notre seigneur a prié et prie.