LA VERSION SYRIAQUE INÉDITE
D'APRÈS UN MANUSCRIT DU DIXIÈME SIÈCLE
Martyre de saint Pierre, l'apôtre
Pierre, mes chers amis, était à Rome. Il se réjouissait dans le Seigneur avec ses frères et était rempli de consolation en voyant le peuple se rassembler tous les jours au nom de notre Seigneur, de notre Dieu et de notre Sauveur Jésus-Christ, qui avait souffert cinquante-quatre (ou trente-quatre ?) ans auparavant et avait été prêché en Judée, en Samarie, à Antioche, à Rome et dans le monde entier par les saints apôtres après son ascension.
Quatre concubines du préfet Agrippa s'étaient réunies à Rome, près de Pierre. Elles s'appelaient Euphémie, Agrippine, Eucharia et Kadouris. Il leur enseigna la pureté et la crainte de Dieu. Elles furent possédées de l'amour du Seigneur et s'engagèrent à ne plus jamais se laisser souiller par le païen Agrippa et à garder la pureté à cause de Notre-Seigneur Jésus-Christ, selon l'enseignement du saint apôtre Pierre.
Quand Agrippa vit qu'elles s'éloignaient de son lit impur, il les menaça et décréta contre elles la peine de mort. Il souffrait beaucoup à cause de son amour pour elles. Il employa des espions pour savoir près de qui elles allaient s'instruire. Apprenant qu'elles s'instruisaient en la chasteté auprès de Pierre, il les envoya chercher et leur dit : « Vous vous attachez à un chrétien, mais sachez que je vous ferai périr, et que je brûlerai cet homme tout vivant. »
Elles supportèrent depuis lors toutes les souffrances plutôt que de se souiller davantage avec le païen Agrippa, parce qu'elles croyaient dans le Messie qui est Dieu et étaient chrétiennes. Elles furent aussi fortifiées par Jésus-Christ, notre Dieu et notre Seigneur.
Une autre femme, nommée Xantippe, extrêmement belle, était mariée à Albinus, prince de Rome et ami de l'empereur. Elle alla, avec d'autres femmes de sénateurs, auprès de Pierre, prince des apôtres, et apprit de lui la pureté et la crainte de Dieu. Elle s'éloigna également de son mari. Celui-ci, qui l'aimait beaucoup à cause de sa grande beauté, s'étonnait de la voir s'éloigner de son lit. Quand il apprit que c'était le chrétien Pierre qui lui avait enseigné la pureté, il fut rempli de colère contre le saint et se proposa de le tuer.
Il y avait alors beaucoup d'hommes et de femmes qui pratiquaient la pureté et la crainte de Dieu d'après l'enseignement de Pierre. À cause de cela, des hommes méchants firent une violente manifestation à Rome. Albinus, l'ami du roi et époux de Xantippe, qui avait le cœur rempli de méchanceté contre Pierre, dit au préfet Agrippa : « Fais justice de ce chrétien nommé Pierre qui a séparé ma femme de moi, sinon je me vengerai moi-même. » Agrippa répondit : « Et moi aussi, j'ai à me plaindre de ce Pierre qui a éloigné de moi mes concubines, ce dont mon cœur souffre beaucoup. »
Albinus répliqua : « Pourquoi donc es-tu lâche et froid, alors que tu devrais être audacieux et brûlant ? Allons, faisons-le arrêter, nous l'accuserons de magie et nous serons vengés de nos femmes. Ne sommes-nous pas assez forts pour le perdre et pour reprendre nos femmes ? »
Or, Xantippe eut connaissance de cela. Elle envoya aussitôt, secrètement, un message à Pierre et lui dit : « Éloigne-toi de Rome avec nos frères et Marcellus, car mon mari Albinus et le préfet Agrippa trament quelque chose contre toi et veulent te faire mourir. »
Quand les frères apprirent cela, ils vinrent tout en larmes supplier Pierre de quitter la ville. Il leur répondit : « Je ne suis pas un fuyard, mes frères. » Mais ceux-ci répliquèrent : « Conserve-toi aussi longtemps que Dieu t'en donnera la force, pour le servir et pour rester à notre tête. »
Pierre écouta les frères et sortit seul. Il ordonna qu'aucun des frères ne l'accompagnât.
Comme Pierre sortait de la porte de la ville, Notre-Seigneur lui apparut. Il se dirigeait vers Rome. Quand Pierre l'eut regardé et reconnu, il lui dit : « Maître, où vas-tu ? »
Notre-Seigneur lui répondit : « J'entre à Rome pour y être crucifié. »
Pierre lui dit : « Seigneur, tu vas être de nouveau crucifié ? » Pierre comprit alors, dans son esprit, la parole du Sauveur. Il le vit monter au ciel, et rentra dans Rome, plein de joie et de consolation, en louant Dieu, qui lui avait prédit ce qui allait lui arriver. Il vint retrouver les frères et leur raconta l'apparition de Notre-Seigneur Jésus-Christ et les paroles qu'il lui avait dites en remontant au ciel.
Les frères furent affligés, pleurèrent beaucoup et lui dirent en gémissant : « Nous te prions, ô notre père Pierre, d'avoir pitié de nous, car nous ne sommes que des enfants. »
Pierre leur répondit : « La volonté du Seigneur s'accomplira toujours, même si nous ne le voulons pas. Mais pour vous, mes enfants, ne vous affligez pas, le Seigneur Dieu vous affermira dans sa foi, vous confirmera dans son amour, et vous donnera la force d'accomplir sa volonté. Pour moi, si le Seigneur me demandait de demeurer ici-bas, je ne résisterais pas. Mais, s'il veut m'enlever à cette terre, je m'en réjouis et en suis heureux. »
Pendant que Pierre parlait, les frères pleuraient amèrement et avaient le cœur brisé.
Après cela, le préfet Agrippa envoya quatre soldats armés et une troupe de ses serviteurs qui se saisirent de Pierre et le ramenèrent devant lui. Quand Agrippa le vit, il ordonna, à cause de sa rancune contre lui, qu'on le crucifiât aussitôt.
Il écrivit sur la sentence qu'on l'avait saisi et qu'il mourrait pour cause de religion.
Quand les frères apprirent que Pierre serait crucifié, ils s'assemblèrent, et beaucoup d'habitants de la ville avec eux : riches et pauvres, puissants et faibles, orphelins et veuves, se réunirent pour chercher à arracher Pierre des mains d'Agrippa.
La foule criait : « Tu commets une injustice contre Pierre, ô Agrippa. Dis-nous quel mal il a fait, à toi ou à l'un des Romains. Nous qui sommes Romains, nous n'avons pas vu Pierre faire une seule action passible de la mort. Si tu ne le délivres pas, nous brûlerons l'immense Rome par le feu et nous en sortirons ! »
Pierre cria à haute voix pour imposer silence aux foules, puis ouvrit la bouche et dit :
« Ô hommes, qui êtes les soldats du Messie Dieu, songez aux souffrances précieuses et sacrées qu'il a supportées pour vous. Rappelez-vous les signes et les prodiges que vous lui avez vu opérer par mes mains, et les guérisons et les miracles qui furent faits au milieu de vous en son nom. Prenez patience, vous savez qu'il viendra et rendra à chacun selon ses œuvres.
Et maintenant, mes frères, ne faites aucun mal à Agrippa et ne le brisez pas, car il n'est que le serviteur de son père, le diable. Vous savez, du reste, que nous ne pouvons éviter que cette œuvre ne s'accomplisse. Pourquoi donc en serais-je affligé et n'irais-je pas au-devant de la croix ? »
Quand Pierre approcha de la croix, il se tint debout près d'elle, ouvrit la bouche et dit :
« Ô nom de la croix, mystère caché, ô grâce ineffable qui se trouve dans le nom de la croix, ô nature de l'homme qui ne peut se séparer de Dieu, ô souvenir des bons combats qui ne peut être caché pour l'éternité sans être prononcé par des lèvres impures.
Je m'efforce, à la fin de ma vie, de te faire connaître, et je ne te tairai pas, ô grand mystère de la croix que j'honore dans mon esprit et dans mon cœur. Ne vous attachez pas à une croix trompeuse, ô vous tous qui espérez en le Messie.
Il n'est pas possible qu'il se révèle une autre croix avant la fin des temps, alors que tout l'univers passera devant Notre-Seigneur et sera éclairé par elle. En elle se réjouiront tous ceux qui espèrent en Notre-Seigneur, lequel fut crucifié sur elle ; et alors rougiront tous ceux qui ne crurent pas en elle.
Écoutez-moi, ô mes frères, et séparez-vous de tout ce qui n'est pas stable. Fermez les yeux et les oreilles aux créatures afin que vous appreniez tout ce qu'a voulu faire le Messie avec son grand mystère pour notre salut. »
Il ajouta ensuite pour son compte :
« Voici l'heure, ô Pierre, de livrer ton corps à ceux qui doivent le prendre. Acceptez la demande que je vais vous faire, ô vous qui attendez et qui êtes prêts à me crucifier : je ne suis pas digne du grand honneur d'être crucifié comme mon maître, mais accordez-moi d'être crucifié la tête en bas. »
Aussitôt, ils le saisirent et le crucifièrent la tête en bas, comme il l'avait demandé. Il s'adressa alors à la foule et parla ainsi :
« Ô hommes qui entendez, écoutez et comprenez ce que je vous dis ainsi suspendu, afin que vous connaissiez le mystère de toute la nature et la constitution première de tout ce qu'elle contient.
Le premier homme, dont je suis maintenant le type et qui est venu la tête en bas, a révélé cette génération qui ne l'avait pas produit, car elle était morte et n'avait pas le mouvement, c'est-à-dire la sensation.
Il retourna alors sa partie inférieure et l'appliqua sur la terre ; puis dans ses mesures et dans ses écrits, il raisonna d'après sa nouvelle position. En conséquence, il songea dans son cœur que les objets situés à droite l'étaient à gauche et que ceux de gauche étaient à droite.
Il changea par suite tout ce qui tenait à sa nature et ce qui était bon, il l'appela mauvais. C'est pourquoi Notre-Seigneur a dit en parabole : "Si vous ne faites pas les choses de droite comme celles de gauche, celles de gauche comme celles de droite, celles d'en haut comme celles d'en bas, celles qui sont en arrière comme celles qui sont en avant, vous n'entrerez pas dans le royaume."
Je vous ai dit cette pensée de mon cœur, afin que vous voyiez dans mon crucifiement la tête en bas un symbole de l'homme primitif à sa naissance et que vous, mes frères qui m'entendez ou m'entendrez, vous découvriez l'erreur qui nous entoure.
Mais il est juste que j'en arrive vite à la croix de mon Seigneur Jésus-Christ, qui est un verbe immense de bonté et dont l'Esprit a dit : "Qu'est-ce que le Messie, sinon le Verbe de Dieu et sa voix ?"
Le Verbe est représenté par ce bois droit sur lequel je suis crucifié, et la voix l'est du côté de la nature de l'homme. Les clous fixés dans le bois signifient tous deux la conversion et la pénitence de l'homme.
Tu m'as montré cela et tu me l'as révélé, ô Verbe de vie qui me parles maintenant. Je te rends grâce, non par les lèvres de la chair ni par la langue qui profère la vérité et le mensonge, ni par la parole qui sort de la matière, mais je te rends grâce par cette voix que l'on perçoit dans le silence, qui ne passe pas par l'organe du corps, qui n'entre pas par les oreilles de chair et n'est pas entendue par la nature impure.
Je te rends grâce, ô mon Seigneur Jésus, par ta parole, par l'esprit qui est en moi et qui t'aime uniquement. Tu es un esprit d'intelligence, tu es à la fois mon père, ma mère, mon frère, mon ami, c'est toi qui me fortifies, tu es ma force, mon aide, mon espérance, mon guide, tous les biens sont en toi. Tu es celui qui es, et il n'y a personne en dehors de toi qui aime uniquement les hommes. »
« Courez à lui, mes frères, si vous allez à sa suite et marchez sur ses traces, vous trouverez les Béatitudes qu'il a promises à ceux qui l'aiment. L'œil n'a pas vu, l'oreille n'a pas entendu, le cœur de l'homme n'a pas conçu ce qu'il a préparé pour ses serviteurs.
Nous te supplions par ce que tu as promis de nous donner, ô Notre-Seigneur Jésus-Christ, que tu rendes notre peuple accompli dans ta bonté.
Nous sommes comblés par ta bonté, ô notre Seigneur, nous te bénissons, nous louons ta bonté, nous te prions, nous, humbles mortels. Tu es l'unique, tu es seul puissant, il n'y a personne en dehors de toi. À toi la gloire, la puissance, l'honneur et l'adoration, au commencement et maintenant et dans les siècles des siècles. Amen. »
Et tout le peuple qui était là et entendait cria à haute voix : « Amen, Amen, Amen. »
Saint Pierre ajouta alors pour tous les fidèles :
« Demeurez ainsi en paix, ô fils de miséricorde. Je vous recommande, comme à toute l'Église présente et future, que vous croyiez dans le Créateur, lequel a un nom beau et délectable, et auquel tous les hommes ont été rattachés par Jésus le Messie, qui est Dieu et fils du Très-Haut. »
Quand saint Pierre, prince des apôtres, eut dit cela, il remit son âme entre les mains de Notre-Seigneur, qui se tenait invisible près de lui.
Marcellus, fidèle disciple, n'eut pas besoin qu'on l'avertît de ce qu'il convenait de faire. Quand il vit que l'apôtre du Sauveur était mort, il descendit de ses propres mains le corps de la croix et le lava dans du lait nouveau et dans du vin vieux.
Il prépara pour cinquante mines d'onguent avec de la myrrhe et beaucoup de baume très cher. Puis, il acheta un sarcophage poli qu'il remplit de miel blanc sans tache appelé attique. Il y plaça le corps de Pierre et le déposa dans son propre tombeau en louant Dieu.
Or, Pierre apparut cette même nuit à Marcellus et lui dit :
« Ô Marcellus, tu as perdu tout ce que tu as fait pour ce mort. Mais tâche de te maintenir dans la vie de la grâce, et tu plairas à ce mort. »
Marcellus, à son réveil, raconta aux fidèles tout ce qu'il avait vu, et tous louèrent Dieu.
Saint Pierre confirma ses frères dans la foi jusqu'à l'arrivée de Paul à Rome.
Pierre confirma ses frères dans la foi jusqu'à l'arrivée de Paul à Rome. Celui-ci fut amené de Judée par un centurion quand il en eut appelé au tribunal de César. Et comme Néron César n'était pas à Rome, saint Paul ne le trouva pas ; il prit une maison à la campagne et y demeura plus de deux ans en attendant l'arrivée de l'empereur pour être jugé en sa présence. À cette occasion, il instruisit les frères, qui augmentèrent en nombre et entrèrent dans l'Église de Dieu sous l'influence de la prédication de Paul et du parfum suave de sa parole. Et tous les Romains voyaient les guérisons, les prodiges et les miracles que Dieu opérait par les mains de son apôtre.
Quand l'empereur Néron César revint à Rome, il apprit le meurtre de l'apôtre Pierre par le préfet Agrippa et fut irrité contre lui parce qu'il l'avait fait mourir sans l'avertir. Car Néron détestait Pierre et aurait voulu le faire mourir sous les coups dans des tortures et des supplices cruels. Aussi, pendant longtemps, il n'adressa pas la parole au préfet Agrippa.
Néron était rempli de colère et d'une fureur meurtrière contre ceux qui crurent en Notre-Seigneur par la prédication de Pierre ; il voulait les faire mourir tous. Pendant qu'il était possédé de ces pensées, il vit en songe un séraphin qui le frappait en disant : « Tu ne peux pas, ô Néron, faire périr les serviteurs du Christ que tu persécutes. Cesse de les poursuivre et ne les fais pas périr. » Néron, entendant cela, fut saisi de crainte et cessa de poursuivre les disciples au moment où Pierre quitta le monde et alla vers Notre-Seigneur Jésus-Christ qu'il aimait.
Or, saint Pierre, disciple et apôtre véritable du Christ, fut crucifié dans la grande Rome, y fut couronné et y mourut le 5 du mois d'abib des Égyptiens et selon le calcul des Romains, le troisième jour des calendes de juillet, et chez les Syriens le vingt-neuvième de khaziran sous l'empereur païen Néron ; notre empereur et notre Dieu étant Jésus-Christ Notre-Seigneur, auquel reviennent la gloire, l'honneur et l'adoration ainsi qu'au Père et à l'Esprit-Saint, maintenant et dans tous les siècles des siècles. Amen.
Ici se termine le martyre de saint Pierre, chef des saints apôtres du Messie.
Martyre de Paul, apôtre élu du Messie
Mes chers amis, Luc de Judée et Tite de Dalmatie demeuraient à Rome et attendaient que Paul vînt auprès d'eux. Après avoir échappé à la mer, Paul arriva à Rome avec le centurion qui avait été envoyé avec lui de Césarée auprès de l'empereur César. Notre-Seigneur l'avait promis quand il apparut à Paul et lui dit : « De même que tu m'as rendu témoignage à Jérusalem, tu me rendras témoignage à Rome. »
Alors Néron n'était pas à Rome, Paul prit donc une maison à la campagne en dehors de la ville et y demeura jusqu'à l'arrivée de l'empereur qui était parti au loin, pour témoigner devant lui. Luc, Tite et les frères qui avaient été convertis par la prédication de Pierre vinrent trouver Paul à sa demeure. Celui-ci, en les voyant, fut rempli d'une grande joie, il prêcha continuellement la parole divine, et beaucoup d'hommes entrèrent dans l'Église de Dieu.
La renommée de Paul se répandit dans toute la ville de Rome parce qu'on y racontait les signes, les prodiges et les miracles que Dieu faisait par ses mains. Il guérissait toutes les maladies, et beaucoup d'hommes de la maison de Néron crurent au Messie, grâce à la prédication de Paul. Rome était dans l'allégresse, et on se rassemblait jour et nuit autour de l'apôtre pour entendre ses saintes paroles.
Au bout d'un temps assez long, Néron revint à Rome. Il avait un jeune échanson nommé Patricius qu'il aimait beaucoup. Ce jeune homme, entendant parler de Paul, sortit de la ville un soir pour aller entendre près de lui la parole de Dieu. Paul était déjà entouré d'une foule nombreuse qu'il instruisait ; aussi Patricius, ne pouvant approcher, monta sur une haute maison d'où il pouvait entendre les paroles de l'apôtre. Elles lui plurent beaucoup ; mais comme la prédication fut longue et dura jusqu'après le milieu de la nuit, le diable, qui hait le bien, fit tomber Patricius dans un profond sommeil, puis le poussa et le jeta à terre. Le jeune homme fut tué sur le coup, et l'empereur, apprenant sa mort, fut affligé et saisi d'une profonde tristesse, car il l'aimait beaucoup.
Paul, voyant en esprit ce qui se passait, dit aux foules qui l'entouraient : « Mes frères, notre adversaire le démon a voulu nous tenter, au dehors de cette assemblée vous trouverez un jeune homme mort, apportez-le près de moi. » Quatre frères sortirent, trouvèrent l'enfant comme l'avait prédit Paul et l'apportèrent près du saint apôtre. Quand ils reconnurent que ce mort était Patricius, ils furent très troublés, parce qu'ils savaient que l'empereur Néron l'estimait beaucoup. Alors Paul dit à la foule : « Ne vous effrayez pas, mes frères, mais priez et suppliez Notre-Seigneur Jésus-Christ d'avoir pitié de nous et de ressusciter ce jeune homme ; voici l'heure de montrer notre foi. » La foule, entendant cela, s'apaisa et invoqua Notre-Seigneur Jésus avec larmes et supplications. Aussitôt le jeune homme se réveilla et sortit de la mort comme d'un sommeil, et le peuple, voyant ce prodige, loua le Dieu Messie et fut confirmé dans la foi. Paul envoya Patricius près de son maître l'empereur Néron.
Néron, comme nous l'avons dit, était affligé de la mort du jeune Patricius. Dès son lever, il se rendit au bain, et avant qu'il en sortît, Patricius revint et se tint prêt à servir à table comme de coutume, car l'empereur ne l'avait pas encore remplacé. Quand il sortit du bain, ses serviteurs vinrent et lui dirent : « Seigneur, Patricius vit, il a repris son office et se tient comme d'habitude près de la table de Votre Majesté. » Quand Néron vit Patricius, il se réjouit beaucoup et lui dit : « Tu es donc vivant ? » Puis il ajouta : « Qui t'a ressuscité ? » Et l'enfant, plein de foi et de confiance dans le Messie, répondit : « C'est Jésus-Christ, roi éternel, qui m'a ressuscité. »
L'empereur César Néron ajouta : « Ce roi doit donc régner toujours et détruire tous les royaumes de la terre ? » Patricius ouvrit la bouche et dit : « Il détruit tous les royaumes de la terre et du ciel et demeure seul pour l'éternité ; il n'y a personne en dehors de lui, aucune parole n'est au-dessus de la sienne, et aucun royaume ne peut éviter sa main. » Néron, à ces paroles, le frappa au visage et dit : « Toi aussi, Patricius, tu crois qu'il est roi ? » Et Patricius répondit à César : « Oui, je crois aussi en lui, car il m'a ressuscité. »
À ces paroles, quatre eunuques que l'empereur aimait beaucoup et qui le servaient dans son palais, nommés Barsabas, Justus, Festus et Cestus, s'avancèrent et dirent : « Nous aussi, dès maintenant, nous sommes les soldats de ce roi éternel Notre-Seigneur Jésus-Christ, vrai Dieu. » L'empereur Néron fut alors saisi d'une rage violente ; il les fit punir de divers supplices et les fit jeter en prison.
À cette occasion, il fut rempli de colère et ordonna dans sa fureur que tous ceux qui se diraient les soldats de ce roi éternel, qui est Jésus-Christ, seraient tués par le glaive. Aussitôt que cet édit fut sorti de la bouche de l'empereur, les satellites et les soldats se répandirent dans toute la ville de Rome, arrêtèrent beaucoup de ceux qui croyaient en Jésus-Christ et les amenèrent enchaînés. Paul était avec eux ; les soldats l'avaient arrêté avec les autres sans le connaître et les conduisirent tous devant l'empereur. Les regards de tous étaient dirigés sur le saint apôtre Paul, et cette direction de tous les regards vers lui montra à Néron qu'il était Paul, le soldat du Messie.
Néron le fit approcher et lui dit : « Tu es bien, ô homme, un soldat de ce grand roi éternel ? » L'apôtre saint Paul répondit : « Je suis le serviteur du grand roi Notre-Seigneur Jésus-Christ, notre Dieu. » L'empereur lui dit : « Voilà que tu es enchaîné et en mon pouvoir, dis-moi pourquoi tu es venu dans mon empire et dans ma capitale ainsi que Pierre, mis à mort par ordre d'Agrippa, pour y séduire des soldats pour votre grand roi éternel ? »
Saint Paul lui répondit devant tout le peuple : « César Néron, sache et comprends bien que ce n'est pas seulement dans ton empire que nous prenons des soldats pour notre grand roi, mais dans tout l'univers. Car Notre-Seigneur nous a ordonné de ne fermer à personne la porte de sa bonté afin que tous les hommes puissent entrer dans la vie éternelle. Il te faudrait aussi devenir un soldat de notre grand roi dont le royaume ne peut périr, tandis que ta richesse et ta puissance ne subsisteront pas et ne peuvent te sauver, si tu ne commences pas à adorer et à révérer notre grand roi éternel qui te donnera le royaume et la vie éternelle. Il arrivera nécessairement qu'il jugera tous les peuples à la fin des temps ; il donnera la vie éternelle à tous ceux qui ont cru en lui, quant à ceux qui n'ont pas cru, il les condamnera avec les pécheurs à la géhenne et aux souffrances éternelles. »
L'empereur fut rempli de colère en entendant ces paroles ; il n'en crut aucune et ordonna de brûler vivants tous ceux qui croyaient en Notre-Seigneur Jésus-Christ. Quant à Paul, il le condamna, selon la loi des Romains, à avoir la tête tranchée. Deux centurions furent chargés de le frapper et de lui trancher la tête, l'un se nommait Longus et l'autre Cestus. Ils emmenèrent Paul au milieu d'une foule nombreuse qui l'accompagnait devant et derrière pour voir la fin de son illustre martyre. Il leur parlait et des fleuves de paroles de vie sortaient de lui, comme il est écrit.
Ce jour-là, par l'opération de Satan, une quantité innombrable de ceux qui croyaient en Notre-Seigneur fut mise à mort dans la ville de Rome. Car nombreux étaient ceux qui avaient cru en Notre-Seigneur Jésus-Christ après la prédication de Pierre et de Paul. Une foule nombreuse se rassembla à la porte du palais de l'empereur en criant : « César Néron, tu as fait tuer assez d'hommes, car ce sont des Romains. Pourquoi fais-tu périr la force de Rome ? » En entendant cela, César défendit aux soldats de tuer encore les chrétiens. Aussi, on ramena Paul devant lui.
À sa vue, le tyran fut irrité de ce que les soldats ne l'avaient pas tué. Paul lui dit : « Dans ce siècle périssable, je ne vis pas pour mon roi, mon maître et mon Dieu Jésus-Christ, mais quand tu m'auras coupé la tête, je t'apparaîtrai afin que tu connaisses que je ne suis pas mort, mais que je vis pour mon roi et mon Seigneur Jésus-Christ, qui viendra juger les vivants et les morts et rendra à chacun selon ses œuvres bonnes ou mauvaises. » À ces paroles, l'empereur César fut enflammé de colère et fit signe aux deux centurions d'emmener Paul et d'exécuter la sentence qui avait été portée contre lui.
Ces deux soldats, Longus et Cestus, emmenèrent aussitôt Paul de devant l'empereur pour lui couper la tête. Durant la route, ils demandèrent à Paul : « Où est ce roi auquel vous croyez, dans lequel vous avez confiance et espoir, et qui vous défend de vous attacher aux dieux des Romains ? » Le saint apôtre Paul leur dit : « Hommes, qui êtes enfoncés dans la plus profonde erreur et ne tirez aucun avantage de vos peines, préservez-vous contre le feu qui viendra sur tout l'univers et brûlera tous les méchants comme vous, qui n'ont pas servi leur bon maître et Dieu Jésus-Christ oublié dans le monde. Car nous ne sommes pas, comme vous le croyez, les soldats d'un roi de la terre, mais nous sommes les serviteurs et aussi les soldats de ce roi du ciel dont la gloire ne sera pas détruite et dont le royaume ne cessera pas, qui est le roi puissant et honoré de l'univers, dont la puissance n'a pas de borne et qui viendra à la fin des temps pour juger tout le monde. Heureux alors ceux qui auront cru en lui, car il leur donnera la vie éternelle. »
À ces paroles, les soldats furent saisis d'une grande crainte ; ils tombèrent aux pieds de Paul et le supplièrent en ces termes : « Nous t'en prions, aide-nous, et rends-nous le service de nous apprendre à être les serviteurs fidèles de ton Dieu, nous te laissons fuir et aller où tu voudras. » Mais Paul leur répondit : « Je ne suis pas un mercenaire ou un serviteur qui fuit son maître, mais un serviteur loyal de mon Seigneur et de mon roi Jésus-Christ. Quand je devrais mourir, je ne fuirais pas, comme vous me le conseillez, mais je vis pour mon roi éternel que j'aime. Je vais vers lui et j'entrerai avec lui dans la gloire de son Père. » Les centurions lui dirent : « Et comment pourrons-nous revivre quand nous aurons été mis à mort ? »
L'empereur envoya deux autres soldats pour voir si Paul était tué ; ils le trouvèrent vivant, et le saint apôtre leur dit : « Ô hommes, soldats de l'erreur, croyez au Dieu vivant qui ressuscitera du tombeau pour la vie éternelle tous ceux qui croient en lui. » Les soldats lui répondirent : « Si quand tu seras mort nous te voyons revivre, nous croirons à ton enseignement. » Ils retournèrent ensuite près de l'empereur et lui dirent que Paul vivait. Or Cestus et son camarade Longus demandaient à Paul la guérison de leur âme. Paul leur répondit : « Si le Seigneur le veut, allez demain avant l'aube au tombeau où l'on aura placé mon corps ; vous y trouverez en prière deux hommes nommés Luc et Tite, et je serai au milieu d'eux, ils vous donneront le signe du Messie Jésus notre vrai Dieu. » Et Paul se tourna vers l'Orient et pria en hébreu. Puis, quand il eut fini sa prière, il prêcha à la foule la parole de Dieu, et beaucoup crurent au Messie. Or Paul était d'un extérieur agréable, sa figure rayonnait la gloire du Messie, et il était aimé de tous ceux qui le voyaient.
Quand l'empereur apprit des deux soldats qu'ils avaient trouvé Paul vivant, il s'irrita et aussitôt envoya un autre soldat cruel pour couper la tête de saint Paul en toute hâte. Paul tendit la tête sans mot dire à ce bourreau qui la trancha sans miséricorde, et, ô prodige admirable que Dieu accomplit dans le corps pur de son saint apôtre ! Il sortit de son corps du lait avec le sang qui jaillit sur les habits du bourreau qui avait coupé sa tête vénérée. À la vue de ce prodige, la foule qui l'entourait se mit à louer Dieu, et beaucoup crurent en Notre-Seigneur Jésus-Christ.
Le bourreau retourna près de l'empereur qui était alors entouré de tous les princes de Rome et raconta ce prodige. À ce récit, tous furent saisis d'une grande crainte. À la neuvième heure, saint Paul fut révélé en esprit et apparut à l'empereur et à tous les philosophes et chefs d'armée qui entouraient son trône. Il dit à l'empereur : « César Néron, voici Paul, le soldat du roi éternel. Je ne suis pas mort, mais je vis pour le roi éternel, notre Seigneur et notre Dieu Jésus-Christ. Pour toi, tu seras accablé de maux sans nombre, parce que tu as répandu le sang de beaucoup d'innocents, et cela s'accomplira contre toi sous peu de jours. » Quand Paul eut cessé de se faire entendre et eut disparu, l'empereur, comme tous ceux qui l'entouraient, fut saisi d'une grande frayeur. Aussi, il ordonna de délivrer tous ceux qui croyaient en Notre-Seigneur Jésus-Christ.
Or, l'échanson Patricius avec les quatre eunuques Barsabas et ses compagnons, et les centurions Longus et Cestus, serviteurs de l'empereur, allèrent dès le matin au tombeau de saint Paul comme il le leur avait dit. En approchant du tombeau, ils trouvèrent deux hommes qui priaient et virent au milieu d'eux l'apôtre Paul dans une grande gloire sans fin. Quand Luc et Tite virent approcher les serviteurs du roi, ils furent saisis d'une crainte humaine et s'enfuirent, mais ceux-ci coururent après eux et leur dirent : « Ne craignez rien de nous. Nous ne vous voulons pas de mal, mais nous demandons que vous nous donniez la vie éternelle, comme Paul, qui prie maintenant au milieu de vous, nous l'a promis hier. » À ces paroles, Luc et Tite se réjouirent beaucoup, ils parlèrent aux serviteurs la parole de Dieu et leur donnèrent le signe du Messie Jésus, le roi éternel, notre maître, et ils furent de véritables chrétiens.
Or, la tête du bienheureux apôtre saint Paul fut tranchée pour le nom de Notre-Seigneur Jésus-Christ, vrai Dieu, dans la grande Rome, le troisième jour avant les calendes de juillet selon les Romains. Ce qui fait, chez les Égyptiens, le cinq du mois d'abib et, chez les Syriens, le 29 khaziran, c'est-à-dire le même jour et le même mois que saint Pierre, prince des apôtres, trois ans après son départ de ce monde, sous l'empereur Néron ; notre Seigneur, notre Dieu et notre Sauveur étant Jésus-Christ auquel gloire, honneur, adoration et puissance avec son Père bon et béni et avec l'Esprit vivant et saint, maintenant, et dans les siècles des siècles.
Fin du martyre du saint élu et apôtre Paul. Que sa prière nous aide !
Martyre de Saint Luc, l'évangéliste
Mes chers amis, à l'époque où les apôtres se rassemblèrent et se partagèrent tous les pays, après qu'ils eurent jeté le sort, Pierre se rendit à Rome la grande, et deux disciples, Tite et Luc, restèrent ses fidèles auxiliaires dans cette ville. Quand Pierre eut été mis à mort à Rome par ordre de l'empereur Néron, ces deux disciples demeurèrent et prêchèrent l'Évangile de Notre-Seigneur Jésus-Christ dans Rome et dans les alentours jusqu'à l'arrivée de l'apôtre Paul, dont ils furent encore les aides dans la ville royale de Rome. Or Néron prit le saint apôtre Paul et le tua à Rome même ; alors Luc, pour fuir l'empereur, sortit de la ville et prêcha dans les bourgs et villages qui entouraient la grande Rome. Luc avait été le secrétaire de Paul, après l'avoir été de Pierre, et avait écrit toutes ses actions et toutes les choses admirables qu'il avait racontées sur Notre-Seigneur Jésus-Christ. Tandis que Luc prêchait dans les villages et les bourgs, Notre-Seigneur Jésus-Christ opérait des prodiges et des merveilles sur des malades de tout genre : les aveugles voyaient, les boiteux marchaient, les lépreux étaient guéris, les sourds entendaient, Luc guérissait toute maladie au nom de Notre-Seigneur Jésus-Christ.
Le peuple de ces pays, à la vue de ces prodiges, croyait en Dieu, en Notre-Seigneur Jésus-Christ, et saint Luc leur bâtissait des églises et des monastères. Tous ceux qui crurent en Notre-Seigneur Jésus-Christ étaient enflammés pour la foi de Dieu et pour le droit enseignement de l'évangéliste saint Luc. Quand les prêtres des idoles des païens virent les merveilles que Notre-Seigneur Jésus-Christ, Dieu vivant, opérait par l'entremise de son évangéliste saint Luc, poussés par le démon, ils formèrent le projet, avec les Juifs qui habitaient dans les villages et les bourgs de ce pays, de se réunir dans un grand temple qui était dans une métropole de cette contrée. Ils résolurent de se rassembler dans ce temple d'idoles le vingt du premier Conoun. Et quand un grand nombre de païens et de Juifs se rassemblèrent dans cet édifice, les prêtres des idoles ornèrent leurs vains dieux d'or, d'argent, de vêtements et de lumières ; les Juifs et païens siégèrent ensemble dans ce temple.
Le premier des prêtres païens se leva, étendit la main, cria d'une voix forte et audacieuse et dit : « Écoutez et pesez mes paroles, vous tous qui aimez ces dieux nombreux si bien ornés. Il est venu dans notre pays des magiciens qui font partie de ces douze Galiléens et de ces soixante-douze que Jésus, nommé le Messie, s'est choisis pour disciples. Ils font en son nom des prodiges et des signes en tout lieu et surtout ici dans Rome et dans sa banlieue, et par leur science de magiciens ils attirent beaucoup de Romains dans leur religion. L'empereur Néron tua beaucoup de leurs chefs et il n'en restait aucun, hors ce Luc qui détourna beaucoup de monde de l'adoration des dieux vers la religion de Jésus le Nazaréen. »
Quand ce prêtre eut ainsi parlé, l'un des chefs de l'assemblée des Juifs nommé Isaac se leva, ouvrit la bouche et dit : « Quand j'étais encore à Jérusalem avant de venir dans ce pays, et que j'apprenais la loi aux pieds d'un docteur nommé Gamaliel, au temps où les princes des prêtres du peuple étaient Anne, Caïphe, Alexandre et Dobalius, à cette époque ils saisirent un homme puissant nommé Jésus, et le crucifièrent sur une croix, puis ils le prirent et le mirent dans un sépulcre, mais après trois jours il ressuscita d'entre les morts. C'est celui-là que prêche Luc. » Et la foule tout d'une voix demanda : « Quel est donc ce nom de Jésus qui a ressuscité ? » Mais dès qu'on eut fait entendre ce nom de Jésus, tous les dieux des païens qui ne sont que des idoles se brisèrent et furent réduits en poussière.
Quand les prêtres des idoles virent cette destruction de leurs dieux, ils se fâchèrent et furent enflammés d'une grande colère, ils déchirèrent leurs vêtements et coururent les cheveux épars à la ville de Rome près de l'empereur, où ils crièrent devant lui et dirent : « Empereur, poursuis les maléfices qui sont dans le nom de Jésus par lequel nos dieux périrent et furent réduits en poussière et emportés comme la paille devant un vent violent. » L'empereur Néron leur répondit : « J'ai fait périr tous ceux qui croient en ce nom. » Les prêtres répondirent : « Nous avons un certain Luc qui fait en ce nom des prodiges et des signes et trompe tout le pays des Romains. » L'empereur demanda : « Où est donc celui-là ? » Ils lui répondirent : « Dans la ville de Prokonèse (?) ». Alors l'empereur fut enflammé de colère contre Luc, il grinça des dents comme un lion et ordonna à quatre gardes du corps et à deux cents soldats d'aller chercher l'évangéliste saint Luc.
Celui-ci enseignait à ce moment la foule nombreuse des fidèles, et quand il connut en esprit que les soldats approchaient du lieu où il était, il renvoya l'assemblée, sortit de la ville, et alla au bord de la mer. Il y trouva un pêcheur et lui dit : « Homme, je sais que ma fin en ce monde est proche, prends ces livres qui m'appartiennent, place-les dans ta maison dans un endroit décent, et lis-les constamment ; ils te révéleront un pays de santé et de vie, pour toi-même et pour beaucoup avec toi. » Et cet homme regardant saint Luc vit des rayons d'un feu éclatant qui éclairaient les joues et le visage de l'évangéliste. Il tomba à ses pieds et l'adora plein d'admiration. Or cet homme se nommait Silas. L'évangéliste lui dit encore : « Voici que l'empereur envoie des soldats pour me conduire près de lui et me mettre à mort. Je sais que la volonté de Dieu est que je quitte maintenant cette vie périssable et une condamnation à mort est rendue contre moi par l'empereur. Voici que les soldats arrivent dans la ville, mais toi demeure en paix. » Quand cet homme eut reçu les livres de saint Luc, il les lut constamment et devint un véritable prédicateur de la parole de Dieu dans tout le pays des Romains, et beaucoup aidés par lui devinrent des docteurs de la vérité.
Mais Luc, en quittant Silas, rentra dans la ville et fut pris par les soldats et conduit à l'empereur. Quand celui-ci le vit il fut rempli de colère contre lui ; mais le saint louait Dieu dans son cœur. L'empereur ordonna qu'on le conduisît en prison jusqu'au lendemain, puis au matin il le fit amener tout enchaîné devant lui et dit : « Tu es bien Luc qui fait périr tout le pays des Romains et réduit les dieux en poudre par tes maléfices. » Saint Luc répondit et dit à l'empereur : « Notre-Seigneur Jésus-Christ dans son Évangile béni et saint nous dit : Si l'on vous persécute dans cette ville fuyez dans une autre, et si l'on vous méprise et que l'on vous dise à tort des paroles méchantes à cause de moi, alors exultez et réjouissez-vous, parce que votre récompense est grande dans le ciel. Je ne connais que les bonnes actions de mon père Pierre, prince des apôtres, je ne connais pas la magie, mais je connais Jésus le Messie. » L'empereur répondit : « Ne vous ai-je pas fait savoir qu'aucun homme ne devait prononcer devant moi ce nom de Jésus ? » Aussitôt que sa bouche eut prononcé ce nom de Jésus, toutes les idoles placées devant lui, et dans lesquelles il croyait, tombèrent et furent réduites en poussière. À cette vue, l'empereur et ceux qui l'entouraient crièrent à haute voix : « Enlevez la vie à Luc qui par ses maléfices a fait périr nos dieux. » Et l'empereur ordonna de le frapper avec une courroie jusqu'à ce que tout son corps saint fût déchiré et que tout son sang fût répandu à terre.
Mais saint Luc, dans son cœur, louait Dieu, qui le fortifiait contre ces cruelles et pénibles souffrances. L'empereur méchant ordonna encore de lui couper la main droite avec le bras, ce qui fut fait aussitôt, puis il lui dit : « C'est cette main qui a écrit des volumes d'erreurs avec lesquels tu trompais les hommes simples du peuple romain, mes sujets ! » Saint Luc répondit à l'empereur et lui dit : « Tu prétends que mon Dieu n'existe aucunement, je vais te montrer à cette heure sa grande puissance. » Et le saint prit son bras de la main gauche et le remit à sa place en disant : « Au nom de Notre-Seigneur Jésus-Christ, fils du Père béni, pour lequel nous abandonnons le monde et à la suite duquel nous marchons, que ce membre se raffermisse à sa place pour l'honneur de ce saint nom afin que les païens ne disent pas : Où est leur Dieu ? À toi la gloire et l'honneur dans les siècles des siècles. Amen. » Luc fit le signe de la croix sur son bras et aussitôt il adhéra de nouveau à sa place.
Quand l'empereur et ceux qui l'entouraient virent ce prodige, ils furent saisis d'un grand étonnement à cause de ce miracle qui avait lieu devant leurs yeux ; mais l'empereur tyran, qui n'avait aucune intelligence humaine ni divine, se cachait la figure de honte et disait : « Voyez combien sont puissants les maléfices de ce Galiléen. » Luc lui répondit : « Je ne suis pas un magicien, mais je veux te montrer la puissance de Notre-Seigneur Jésus-Christ et que je ne fuis pas la mort de ce monde. » Et il prit de nouveau son bras et le plaça à terre.
À la vue des signes et des merveilles que Dieu accomplissait par son serviteur Luc l'évangéliste, Anatolinus, chef des armées de l'empereur, crut dans le Seigneur avec toute sa famille au nombre de 267 personnes. L'empereur Néron, dans sa méchanceté, ordonna de les tuer tous par le glaive. Telle fut la fin de ces saints, en un même jour, pour la foi du Messie, le treize avant les ides de décembre, mois des Romains, et le 18 du mois de paophi des Égyptiens.
L'empereur ordonna de couper la tête à saint Luc, puis de mettre son corps avec des pierres dans un sac et de le jeter dans les profondeurs de la mer. Quand le saint évangéliste Luc eut entendu sa sentence, les soldats cruels le firent sortir vers la mer pour lui couper la tête. Et le bienheureux leur dit : « Sur votre vie, prenez patience que je prie mon maître et mon Dieu. » Puis il ouvrit la bouche et pria en ces termes : « Mon Seigneur Jésus-Christ, qui as tout créé dans ta sagesse d'après ta bonne volonté : le ciel, la terre, la mer et tout ce qu'ils contiennent, aie pitié de ton serviteur ; pardonne-moi toutes mes rebellions et donne-moi le repos près de mon père Pierre. »
Quand il eut dit ces paroles, l'un des soldats, qui était borgne, se jeta sur saint Luc pour lui trancher la tête, mais aussitôt l'œil de ce soldat qui ne voyait pas s'ouvrit. Dès qu'il s'aperçut du service que lui rendait le saint, il jeta son épée, s'approcha de saint Luc, se jeta à ses pieds et l'adora en disant : « Saint du Seigneur, pardonne-moi mon péché contre toi. » Mais le chef de ces soldats survint dans une rage diabolique et il trancha la tête du saint évangéliste Luc ainsi que celle du soldat qui avait cru en Notre-Seigneur Jésus-Christ.
Puis ces cruels soldats placèrent le corps de saint Luc dans un sac et le jetèrent à la mer. Mais la Providence divine, qui veille sur les saints, ordonna aux flots de la mer de jeter le corps de saint Luc de nuit dans une île. Un chrétien sortit pour aller à la pêche, il trouva le corps du saint, le prit et le porta à sa maison. Alors Dieu s'en servit pour opérer des signes et des merveilles sans nombre. Il chassa les démons qui criaient et disaient : « Malheur à nous à cause de toi, évangéliste Luc, disciple du Messie, voici que le feu vivant qui est ton corps, c'est-à-dire le corps et le sang de ton maître, nous a chassés. »
Quand cela fut connu des habitants du pays, ils le prirent avec de grands honneurs pour le placer dans un lieu saint, et il venait en aide à tous les enfants de la sainte Église.
Le martyre de saint Luc, évangéliste et apôtre du Messie, fut terminé le 14 avant les calendes de décembre, mois des Romains, le 22 de paophi, mois des Égyptiens, et le 19 du premier teschri, mois des Syriens, sous l'empereur Néron ; notre roi étant Notre-Seigneur Jésus-Christ pour toujours, auquel gloire, honneur et adoration avec son Père béni et bienheureux, et l'Esprit vivant et saint, maintenant et dans les siècles des siècles. Amen.