CHAPITRE PREMIER. L’ÂME DE LA FEMME EST-ELLE FORMÉE DE CELLE DE L'HOMME.

 

1. Si nous suivions l'ordre historique, nous aurions maintenant à traiter de la faute du premier homme.

Mais comme l'Ecriture expose la formation du corps de la femme sans parler de son âme, ce silence doit nous frapper et faire examiner avec attention s'il y a, oui ou non, des raisonnements décisifs contre ceux qui prétendent que l'âme sort d'une autre âme, comme le corps d'un autre corps, par une sorte de transfusion, qui fait passer des parents chez les enfants les premiers principes de chaque substance. Tout d'abord ils soutiennent que Dieu, en soufflant sur la face de l'homme qu'il avait tiré de la poussière, créa l'âme dont toutes les autres devaient sortir, au même titre que le corps du premier homme contenait ceux de ses descendants. En effet, Adam avait été formé le premier, Eve le fut ensuite; on nous apprend d'où viennent le corps et l'âme d'Adam; l'un de la terre, l'autre du souffle de Dieu; quant à la femme, après avoir raconté comment elle fut tirée d'une côte de l'homme, on ne dit pas qu'elle fut également animée par le souffle divin; on laisse croire qu'elle est sortie âme et corps de celui qui avait d'abord été formé. Or, disent-ils, ou l'Ecriture devait rester muette sur l'âme de l'homme, afin de nous laisser deviner ou conclure par nous-mêmes`que son âme avait été un don de Dieu; ou bien, si son but était d'empêcher qu'on n'assignât la terre pour origine commune à l'âme et au corps, elle ne devait pas rester muette sur l'âme de la femme, de peur qu'on n'y vit par une erreur toute naturelle, si toutefois c'est une erreur, une substance transmise. Donc, ajoutent-ils, si Dieu n'a point soufflé sur la face de la femme, c'est uniquement parce que son âme s'est formée de celle de l'homme.

2. Ce n'est là qu'une présomption, et il est facile de la combattre.

L'âme de la femme, dit-on, s'est formée de celle de l'homme, parce que l'Ecriture ne dit pas que Dieu ait soufflé sur sa face pourquoi admettre alors que l'âme de la femme vient de l'homme, puisque l'Ecriture n'en dit également rien? Loin de là : si Dieu, à mesure que les hommes naissent, crée leurs âmes comme il a créé la première, l'Ecriture a gardé naturellement le silence, puisqu'il suffit d'une simple induction pour appliquer à toutes ce qu'elle a dit d'une seule. Admettons d'ailleurs que l'Ecriture ait voulu ici éveiller notre attention : si la formation de la femme avait différé de celle de l'homme en ce point, que l'âme, chez la femme, s'était produite par propagation, tandis que l'âme et le corps de l'homme avaient eu chacun leur origine; l'Ecriture aurait dû insister précisément sur cette différence, pour empêcher de raisonner par analogie. Mais comme elle n'a point dit que l'âme de la femme s'était formée de celle de l'homme, il est plus vraisemblable de croire qu'elle a voulu prévenir toute hypothèse en dehors des idées qu'elle venait de nous donner sur l'origine de l'âme chez l'homme; en d'autres termes, nous indiquer que ces deux âmes étaient également un don de Dieu même. De plus l'Ecriture aurait trouvé une occasion bien naturelle de formuler cette pensée, sinon au moment où la femme se forma, du moins lorsqu'elle fut faite et qu'Adam s'écria : « Voilà l'os de mes os et la chair de ma chair (1). » N'était-ce pas en effet le moment d'ajouter dans une effusion d'amour et de tendresse : Et l'âme de mon âme? Mais ce simple raisonnement ne suffit pas pour résoudre un problème aussi important: nous n'avons encore établi aucune proposition incontestable.

CHAPITRE II. RÉSUMÉ DES CONSIDÉRATIONS FAITES DANS LES LIVRES PRÉCÉDENTS SUR L'ORIGINE DE L'AME.

3. La première question à examiner est de savoir si l'Ecriture interprétée attentivement, comme nous lé faisons, depuis le début de la Genèse, permet ici le doute: ce point éclairci, nous aurons à choisir l'opinion la plus probable, ou à fixer, s'il y a incertitude absolue, les bornes où il faut savoir se renfermer.

Il est incontestable, que le sixième jour Dieu fit l'homme à son image, et qu'en même temps il le créa mâle et femelle (1). Nous avons reconnu précédemment (2), que la ressemblance avec Dieu était propre à l'âme, tandis que la distinction des sexes était spéciale à la chair. Une foule de témoignages imposants, que nous avons alors discutés en détail, nous ont empêchés de rapporter au sixième jour la formation de l'homme et celle de la femme, tirés, l'un de la poussière, et l'autre d'une côte de l'homme, la formation de la femme étant évidemment postérieure à l'époque où Dieu créa toutes ses oeuvres du même coup (3). Nous avons alors essayé de formuler notre opinion sur l'âme de l'homme, et une discussion aussi complète qu'approfondie nous a conduits à croire, ou du moins à regarder comme probable que la création de l'âme chez l'homme se rattachait aux oeuvres primitives de Dieu, tandis que la formation de son corps était implicitement comprise dans le monde matériel. Par là, nous avons évité plusieurs conséquences opposées aux témoignages de l'Ecriture, par exemple, que le sixième jour l'homme aurait été formé du limon de la terre et la femme tirée d'une de .ses côtes; que l'homme n'aurait été créé . à aucun titre le sixième jour; que le corps aurait été créé en principe, tandis que l'âme, qui constitue la ressemblance .de l'homme avec Dieu, ne l'aurait pas été. Enfin nous n'avons pas été contraints d'admettre un opinion qui, sans contredire l'Ecriture, est bizarre, insoutenable, et d'après laquelle l'âme de l'homme aurait été renfermée en principe dans un être spirituel créé tout exprès, sans que l'Ecriture en fit aucune mention parmi les ouvrages de Dieu, ou même qu'elle aurait été implicitement comprise dans les êtres déjà créés, au même titre qu'un enfant aujourd'hui est implicitement renfermé dans les parents qui doivent lui donner le jour, et par conséquent, qu'elle aurait été la fille d'un ange ou, ce qui est plus insoutenable encore, une transformation de la matière.

CHAPITRE III. TROIS HYPOTHÈSES SUR L'ORIGINE DE L’ÂME.


4. Mais si l'âme de la femme, loin d'être émanée de celle de l'homme, a été, comme pour celui-ci, un présent de Dieu, et que la création des âmes soit successive, il faut ou reconnaître que l'âme de la femme n'a aucun rapport avec les oeuvres de la création primitive, ou supposer que le principe de la formation des âmes a été établi en général, comme celui de la reproduction des corps, et par conséquent retomber dans l'opinion si bizarre et si insoutenable que les âmes humaines sont fille des anges, ou, ce qui révolte encore davantage, du ciel physique, et même d'un élément plus grossier encore. Puisque la vérité absolue nous est cachée, il faut examiner qu'elle est l'opinion la plus vraisemblable.

Or, il y en a trois : je viens en dernier lieu d'expliquer la première; d'après la seconde, Dieu n'aurait créé primitivement qu'une seule âme, celle du premier homme, et toutes les âmes en viendraient par une sorte de propagation; d'après la troisième, les âmes seraient successivement créées, sans avoir préexisté même virtuellement dans les oeuvres primitives des six jours. De ces trois hypothèses, les deux premières n'ont rien qui contredise la théorie de la création primitive où Dieu fit tout à la fois. En effet, que le principe de l'âme humaine ait été créé dans un être destiné à lui servir comme de père, de telle sorte que toutes les âmes y prennent naissance et soient créées par Dieu qui lés donnerait aux hommes en même temps que les parents fourniraient le corps; ou que l'âme ait été créée, quand fut créé le jour, sans avoir une raison d'être préexistente, semblable à celle qui renferme implicitement un enfant dans son père, et qu'elle se soit faite comme le jour, le ciel, la terre, les luminaires du ciel;. dans les deux cas, on peut dire, en même temps que l'Ecriture : « Dieu fit l'homme à son image. »

5. Quant à la troisième hypothèse, il est bien difficile de la concilier aveu le principe incontestable que l'homme fut créé, le sixième jour, à l’image de Dieu, et ne reçut qu'après le sixième jour une forme visible. Prétendre que Dieu crée des âmes nouvelles sans les avoir créées le sixième jour, soit en elles-mêmes, soit dans un principe qui les contint au même titre que le (267) père renferme son fils, et sans les avoir faites conjointement avec ces oeuvres à la fois inachevées et complétés dont il se reposa le septième jour; c'est rendre inutile le soin minutieux avec lequel l'Ecriture nous apprend que Dieu acheva toutes ses œuvres le sixième jour et les trouva excellentes, car c'est supposer qu'il devait après cette époque créer des substances sans les avoir formées primitivement en elles-mêmes ou dans leurs causes. Voudrait-on dire que Dieu garde en lui-même le principe selon lequel il crée au moment de la conception chaque âme en particulier au lieu de l'avoir établi dans la créature? Mais comme l'âme aujourd'hui est de la même espèce que celle qui fut donnée à l'homme le sixième jour et lui valut sa ressemblance avec Dieu, on ne saurait dire que Dieu crée aujourd'hui une âme qu'il n'aurait point alors achevée. A ce moment, en effet, il avait créé l'âme telle qu'il la crée encore aujourd'hui : par conséquent il ne crée pas aujourd'hui une espèce nouvelle, sans rapport avec les oeuvres qu'il acheva primitivement. Loin donc de s'accomplir en dehors des causes que contiennent les êtres futurs et qui ont été déposées dans l'univers, l'opération divine n'en est que le développement; les corps humains n'étant qu'une propagation à travers les siècles d'une cause primitive, c'est en vertu d'une loi analogue que doivent s'y associer les âmes, telles que Dieu les crée et les unit aux organes.

6. Nous pouvons maintenant, sans craindre de contredire l'Ecriture sur la création primitive, faire ressortir la probabilité plus ou moins grande d'une de ces trois hypothèses; entrons donc dans la question en lui donnant, avec l'aide de Dieu, tout le développement qu'elle comporte.

Si nous ne pouvons arriver à ce degré d'évidence qui exclut le doute, tâchons au moins de nous former une opinion qu'on puisse adopter en attendant la pleine lumière, sans tomber dans l'absurdité. Si nous ne pouvons atteindre ce modeste résultat, si les arguments se balancent et se détruisent, nous prouverons, en restant dans le doute, que nous n'évitons pas les recherches laborieuses mais les affirmations inconsidérées. De la sorte, celui qui posséderait la vérité, daignera nous la communiquer : quant à ceux dont l'assurance tient de la présomption plus qu'elle n'est fondée sur l'autorité de l'Ecriture ou sur l'évidence du raisonnement, ils ne. dédaigneront pas de partager nos doutes.

CHAPITRE IV. DE QUELQUES PRINCIPES INCONTESTABLES A PROPOS DE LA NATURE ET DE L'ORIGINE DE L’AME.


7. Tout d'abord, tenons pour certain que l'âme ne peut ni se changer en corps et devenir matérielle, ni dégénérer en âme déraisonnable et s'identifier avec celle des bêtes, ni enfin se confondre avec la substance divine, et qu'également ni le corps ni l'âme des bêtes ni la nature divine ne peuvent se transformer et devenir âme humaine. Un point aussi incontestable, c'est que l'âme humaine n'est et ne peut être qu'une création de Dieu. Or, si Dieu ne l'a fait sortir ni de la matière, ni d'une âme sans raison, ni de sa propre substance, la question se réduit à savoir s'il l'a tirée du néant ou d'une substance spirituelle et intelligente. Qu'il .la fasse de rien, après- avoir achevé les oeuvres où il créa tout à la fois, c'est une thèse qu'il serait par trop fort de vouloir démontrer, et s'il existe dés preuves sérieuses en faveur de cette opinion, je ne les connais pas. Qu'on ne vienne pas nous imposer des idées que l'homme ne peut comprendre; le pourrait-il, je m'étonnerais fort qu'on pût les communiquer à d'autres esprits qu'à ceux qui par leurs propres forces et sans avoir besoin des lumières d'autrui sont capables de les concevoir. En de telles matières il est plus sûr de laisser de côté les opinions humaines et de se borner à peser attentivement le sens des témoignages divins.

CHAPITRE V. L’AME N'EST UNE ÉMANATION NI DES ANGES, NI DES ÉLÉMENTS, NI DE LA SUBSTANCE DIVINE.

 

8. L'opinion d'après laquelle Dieu donnerait lés anges pour principe et comme pour pères aux âmes, ne s'appuie sur aucun témoignage des Livres canoniques : du moins je ne le connais pas.

A plus forte raison ne sauraient-elles sortir des éléments matériels. On sera peut-être embarrassé par le. passage du prophète Ezéchiel annonçant la résurrection des morts, qui fait venir l'esprit des quatre vents du ciel, afin qu'il les vivifie par son souffle et les ressuscite. Voici ce passage : « Le Seigneur me dit: Prophétise et adresse-toi à l'Esprit. Prophétise, fils de l'homme et dis à l'Esprit : Viens des quatre vents, souffle sur ces morts et qu'ils revivent. Je prophétisai (268) donc, comme le Seigneur me l'avait commandé, et l'Esprit entra en eux, et ils reprirent la vie, et ils se tinrent sur leurs pieds et ils formaient une troupe considérable (1). » Ces paroles cachent selon moi une prophétie et nous révèlent que les hommes ressusciteront non-seulement dans la campagne où s'est montrée la vision, mais encore dans le inonde entier, désigné par les vents qui soufflent des quatre coins de l'univers. N'allons pas voir en effet la substance même de l'Esprit-Saint dans le souffle que Notre-Seigneur tira de son corps pour le répandre sur ses disciples, quand il leur dit : « Recevez l'Esprit-Saint (2), » non; Jésus-Christ révèle que le Saint-Esprit procède de lui comme le souffle procède de son corps. Mais le monde n'étant point uni à Dieu hypostatiquement, comme le corps de Jésus-Christ l'est au Verbe, Fils unique de Dieu, nous ne saurions dire que l'âme sort de la substance divine, au même titre que le souffle, qui part des quatre coins de l'univers, est formé de ses éléments. A mes yeux, ce souffle était une réalité et un symbole, comme on peut très-bien le concevoir par le souffle que le Seigneur tiré de son corps, et lors même que le prophète aurait moins exposé la résurrection de la chair, telle qu'elle doit un jour s'accomplir, qu'il n'aurait révélé par une allégorie le rétablissement inespéré d'un peuple détruit en apparence, par la vertu de l'Esprit qui a rempli l'univers (3).

CHAPITRE VI. TEXTES DE L'ECRITURE QUI PEUVENT S'ENTENDRE DE LA CRÉATION SUCCESSIVE ET DE LA TRANSMISSION DES AMES.

 

9. Voyons maintenant en faveur de quelle hypothèse l'Écriture fait pencher la balance :

en d'autres termes est-il plus conforme à l'Écriture que Dieu ait créé et donné au premier homme une âme destinée à produire toutes les autres, par une loi analogue à celle qui devait faire sortir du corps d'Adam le corps de tous les hommes, ou que Dieu crée successivement les âmes comme il en a créé une pour le premier homme, sans que celle-ci ait servi de principe générateur aux autres? Le passage d'Isaïe : « C'est moi qui ai créé tout souffle (4), » tout en s'appliquant à l'âme, comme on le voit clairement par le contexte, s'explique dans les deux hypothèses. En effet, que Dieu tire les âmes de l'âme du premier homme, ou qu'il les crée d'après une loi qu'il s'est réservé d'appliquer, il est toujours et absolument le créateur des âmes.

10. Ces paroles du Psalmiste : « Il a formé le coeur de chacun d'eux (1), »

à prendre le coeur pour une expression qui désigne l'âme, se concilient également bien avec l'une ou l'autre des deux hypothèses que nous discutons. Dieu, en effet, forme chaque âme soit qu'il la tire de celle qu'il souffla sur la face du premier homme, de la même manière qu'il forme chaque corps, soit qu'il les façonne et les envoie dans chaque corps, ou même qu'il les façonne dans le corps même ou il les a envoyées. A mon sens toutefois, ces paroles ne s'appliquent qu'à la régénération qui s'accomplit chez l'âme par la vertu de la grâce et y renouvelle l'image de Dieu. « C'est la grâce, dit l'Apôtre, qui vous a sauvés par la foi. Cela ne vient pas de vous, c'est un pur don de Dieu, et non le fruit de vos oeuvres, de sorte que l'homme ne peut s'en rapporter la gloire. En effet, nous sommes son oeuvre, créés en Jésus« Christ, pour opérer de bonnes oeuvres (2). » Il ne faudrait pas voir dans cette grâce de la création une formation matérielle; il faut l'entendre d'après ces paroles du Psalmiste: « O Dieu, créez en moi un coeur pur (3). »

11. J'expliquerai encore de la même manière le passage où il est dit que Dieu façonna l'esprit de l'homme au dedans de lui (4).

 

L'acte par lequel Dieu crée l'âme et l'envoie dans le corps y semble distinct de l'acte par lequel il la crée dans l'homme lui-même, c'est-à-dire la renouvelle. Mais supposons qu'il soit ici question de l'origine de l'homme et non de sa régénération par la grâce : ce texte peut s'expliquer dans les deux opinions. Dieu en effet peut .tirer de l'âme unique du premier homme le germe de l'âme, pour ainsi dire, et le façonner au dedans de l'homme afin de vivifier son corps; il peut encore répandre l'esprit de vie dans le corps par une autre voie que la transmission, et le façonner dans cette organisation mortelle, pour faire de l'homme une âme vivante.

CHAPITRE VII. D'UN PASSAGE DE LA SAGESSE : A QUELLE HYPOTHÈSE EST-IL FAVORABLE.

12. Voici un texte du livre de la Sagesse qui demande un examen plus attentif : « J'ai reçu une âme bonne, et devenant meilleur, je m'unis à un corps pur (1). »

Ce texte, en effet, semble être favorable, non à l'hypothèse selon laquelle toutes les âmes sortiraient d'une seule par propagation, mais à celle qui fait descendre les âmes d'en haut pour s'associer à un corps. «J'avais reçu une âme bonne, » qu'est-ce à dire? Il semblerait que dans le principe où les âmes sont renfermées, si toutefois ce principe existe, les unes sont bonnes, les autres non, et qu'elles en sortent selon la destinée imposée à chaque homme, ou que Dieu, au moment de la conception, de la naissance même, en crée de bonnes et de mauvaises qui se repartissent au hasard. Il serait par trop étrange que ce texte fût favorable aux partisans de la création successive des âmes plutôt qu'à ceux qui prétendent que les âmes sont envoyées dans tel ou tel corps selon les mérites qu'elles ont acquis dans une vie antérieure. Quelle autre. raison que celle des bonnes oeuvres pourrait expliquer l'arrivée d'une âme bonne ou mauvaise dans le corps d'un homme? Elles ne peuvent être telles assurément dans l'essence qu'elles tiennent de Celui quia créé toutes les substances elles a créées excellentes. Mais loin de moi la pensée de contredire l'Apôtre qui nous révèle que les enfants de Rebecca, étant encore dans son sein, n'avaient fait ni bien ni mal avant leur naissance, et qui prouve par là que cette prédiction : « L'aîné sera assujetti au plus jeune, » n'avait aucun rapport à leurs oeuvres, mais à la volonté de celui qui appelle (2). Oublions donc un moment ce passage du livre de la Sagesse; car, il faut aussi tenir compte de l'opinion vraie ou fausse d'après laquelle ces paroles concernent uniquement l'âme du Christ, Médiateur entre Dieu et les hommes. S'il le faut, nous examinerons plus bas quel est le sens de ce texte, à supposer qu'il ne s'applique pas à Jésus-Christ, de peur de contredire un dogme enseigné par l'Apôtre, en croyant que les âmes acquièrent des mérites personnels, avant de vivre unies à un corps.

CHAPITRE VIII. D'UN PASSAGE DU PSALMISTE : QU'IL NE CONTRARIE AUCUNE DE CES HYPOTHÈSES.

13. Examinons maintenant cet autre passage «Vous retirerez leur souffle, elles détailleront dans leur poussière.

Vous renverrez votre souffle, elles seront créées et vous renouvellerez la face de la terre (1). » Ces paroles semblent offrir un sens favorable à.ceux qui pensent que les parents produisent l'âme aussi bien que le corps de leurs enfants. Le Psalmiste en disant « leur souffle » propre, indique une transmission d'homme à homme. Mais les hommes ne sauraient rendre le souffle aux morts pour les ressusciter, parce que loin de le recevoir d'une âme humaine comme au moment de la naissance, on le recouvre par la puissance du Dieu « qui ressuscite les morts. (2) » Voilà pourquoi le Psalmiste dit à la fois le souffle des hommes et le souffle de Dieu: le souffle des hommes quand ils meurent, le souffle de Dieu quand ils ressuscitent. D'autre part ceux qui prétendent que les âmes ne sont point transmises par les parents, mais que Dieu les envoie, peuvent concilier ce texte avec leur opinion, en disant que le souffle est propre à l'homme quand il meurt, en ce sens qu'il était en lui et qu'il en sort; et qu'il appartient à Dieu au moment de la résurrection, parce qu'il rend l'âme qu'il avait envoyée au moment de la naissance. Ainsi ce témoignage ne contredit aucune des deux hypothèses.

14. A mon sens, ce texte s'entendrait mieux de la grâce divine qui nous renouvelle intérieurement.

 

L'orgueilleux qui vivait d'après les instincts de l'homme terrestre et qui rapportait tout à sa vanité, voit se retirer en quelque sorte son souffle propre, lorsqu'il se dépouille du vieil homme, qu'il s'abaisse, afin de bannir l'orgueil pour devenir parfait, et qu'il dit au Seigneur avec un humble aveu : « Souvenez-vous que je suis poussière (3), » après avoir entendu cet avis de l'Ecriture : .« Pourquoi la cendre et la poussière s'enorgueillit-elle? Contemplant avec les yeux de la foi la justice de Dieu , pour ne plus chercher à établir la justice de ses oeuvres, (4) » il se méprise comme dit Job, se dessèche et ne voit en lui que cendre et poussière, et c'est ainsi « qu'il rentre dans sa poussière. » Mais quand il a reçu l'esprit de Dieu, il s'écrie : « Ce n'est plus moi qui vis, c'est Jésus-Christ qui vit en moi, (5) » et c'est ainsi que la grâce du nouveau Testament « renouvelle la face de la terre » et multiplie les saints.

CHAPITRE IX. D'UN PASSAGE DE L'ECCLÉSIASTE : QU'IL S'APPLIQUE INDIFFÉREMMENT AUX DEUX HYPOTHÈSES.

 

15. Quant à ce passage de l'Ecclésiaste : « Que la poudre retourne dans la terre; comme elle y avait été , et que l'esprit retourne à Dieu, qui l’a donné (1), »

 

loin de favoriser une hypothèse aux dépens de l'autre, il s'applique indifféremment au deux. Ce texte, diront les uns, prouve bien que l'âme, loin d'émaner des parents, est donnée par Dieu; car, tandis que lit poussière, c'est-à-dire la chair qui en a été faite, rentrera dans la poussière, l'esprit retournera à Dieu qui l'avait donné. Oui sans doute, répondront les autres, l'esprit retourne à Dieu qui l'a donné au premier homme quand il souffla sur sa face (2), et la poussière, en d'autre termes, le corps humain rentrera dans la terre dont elle est venue primitivement (3). L'âme ne doit point retourner aux parents, bien qu'elle en sorte par une transmission qui remonte jusqu'au premier homme, au même que titre la chair ne retourne point après la mort aux parents, dont elle est un produit manifeste. Par conséquent, de même que la chair rentre, non dans les corps dont elle s'est formée, mais dans la terre dont elle est sortie pour composer le corps du premier homme; de même l'esprit ne retourne point aux hommes qui l'ont transmis, mais à Dieu qui l'avait uni à la chair du premier homme.

16. Ce texte sert du moins à nous rappeler que Dieu a tiré l'âme qu'il donna au premier homme du néant, et non de quelque être préexistant, comme il tira le corps de la terre : par conséquent l'âme ne peut revenir qu'à celui là même qui l'a donnée; n'ayant point été formée d'une créature, elle n'y saurait rentrer comme le corps rentre dans la terre. Or elle n'a été formée d'aucun être, puisqu'elle a été faite de rien. C'est donc à son Créateur, à celui qui l'a faite de rien, qu'elle se rend, du moins quand elle accomplit son retour. Toutes en effet ne l'accomplissent pas, parce qu'il y a « des esprits qui passent, comme dit l'Ecriture, et qui ne reviennent point (4). »

CHAPITRE X. IL EST DIFFICILE DE RÉSOUDRE LA QUESTION DE L'ORIGINE DE L’AME AVEC LES TEXTES DE L'ECRITURE SAINTE.

17. Il est donc bien difficile de rassembler sur cette question des passages décisifs.

On peut sans doute recueillir des textes, les citer, leur donner même de longs développements; mais si on ne peut en déduire des vérités aussi incontestables que la.création de l'âme par Dieu, et le don qu'il y en a fait au premier homme, je ne vois plus comment on pourrait trouver dans les témoignages de l'Écriture la solution du problème. S'il avait été écrit que Dieu souffla également sur la face de la femme, après l'avoir formée, et qu'elle devint ainsi une âme vivante, ce serait pour lui un rayon de lumière, et nous pourrions croire que l'âme associée aux organes n'est. point une émanation de l'âme des parents. Toutefois il resterait encore à savoir ce qu'on devrait penser de la génération, acte d'après lequel l'homme sort d'un autre homme. Car la première femme ne se forma point par cette voie, et à ce titre, on pourrait dire que l'âme qu'elle reçut de Dieu ne fut point une émanation de celle d'Adam, puisqu'elle n'en sortit point comme un enfant de son père. Si seulement l'Écriture nous avait révélé que le premier enfant d'Adam et d'Eve reçut son âme, non par propagation, mais par un don d'en haut, c'est alors qu'on aurait pu induire la même chose pour toutes les âmes, malgré le silence des livres saints.

CHAPITRE XI. DU PASSAGE DE SAINT PAUL RELATIF AU PÉCHÉ ORIGINEL, ET DU BAPTÊME DES ENFANTS.


18. Examinons encore un passage de l'Apôtre et voyons si, sans contredire ces hypothèses, il se concilie également avec chacune d'elles; voici ce passage : « Un seul homme a introduit le péché dans le monde et par le péché la mort, qui a ensuite passé dans tous les hommes, tous ayant péché en lui; » et un peu plus bas : « De même donc que par le péché d'un seul, tous les hommes sont tombés dans la condamnation de la mort, ainsi par la justice d'un seul tous ont reçu la justification de la vie. Car de même que par la désobéissance d'un seul, beaucoup (271) ont été faits pécheurs, ainsi par l'obéissance d'un seul beaucoup deviendront justes (1). » C'est sur ce passage de l'Apôtre que les partisans de l'hypothèse de la propagation des âmes cherchent à édifier leur système. S'il n'y que la chair, disent-ils, pour avoir péché et pour rendre pécheur,ces paroles n'entraînent pas rigoureusement pour conséquence que les âmes des parents produisent celles des enfants: mais si l'âme seule pèche, quelque amorce que lui jette la chair, comment admettre « que tous aient péché en Adam, » sans reconnaître que leur âme, comme leur corps, soit issue d'Adam? Comment seraient-ils devenus pécheurs par la désobéissance d'un seul, si leur âme comme leur corps n'avait point péché en lui ?

19. Prenons garde en effet de faire de Dieu l'auteur du péché, en supposant qu'il associe l'âme à un corps qui la condamne à pécher, ou bien d'admettre qu'indépendamment de Jésus-Christ, le seul qui n'ait point péché en Adam, d'autres âmes peuvent s'affranchir du péché originel sans le concours de la grâce, en reconnaissant que le péché originel est relatif au corps qu'on tient d'Adam, et non à l'âme. Cette dernière opinion est si opposée à la foi catholique, que les parents s'empressent de faire recevoir à leurs enfant nouveau-nés la grâce du saint Baptême. Or, si le baptême affranchit du péché originel en ce qui touche le corps, sans purifier l'âme, on pourrait se demander avec raison quel malheur il résulterait pour les âmes de sortir du corps, avant le baptême, dans un âge si tendre. La vertu de ce sacrement ne s'étend-elle qu'à la chair, sans produire aucun effet sur l'âme ? Il faudrait alors baptiser jusqu'aux morts. Mais, comme nous voyons par la pratique constante de l'Eglise, qu'on se précipite au secours de ceux qui vivent encore, dans la crainte de rencontrer un cadavre pour lequel il n'y aurait plus rien à faire, il faut bien en conclure, à mon sens, qu'il n'y a point de nouveau-né qui ne soit un Adam, en corps et en âme, et qui n'ait besoin de la grâce de Jésus-Christ. En effet, cet âge est incapable par lui-même de faire le bien et le mal, et l'âme serait en ce moment innocente et pure, si elle ne sortait d'une tige corrompue. Que les partisans de l'opinion contraire démontrent qu'une telle âme subit une juste condamnation, quand elle quitte le corps avant le baptême; ils auront accompli un prodige de logique.

CHAPITRE XII. LA CONCUPISCENCE DE LA CHAIR TIENT A L’AME ET A LA CHAIR TOUT ENSEMBLE.

 

20. La Vérité même se fait entendre dans ces paroles : « La chair convoite contre l'esprit, et l'esprit contre la chair (1); »

toutefois, s'il est un point incontestable pour le savant comme pour l'ignorant, c'est que la chair ne pourrait sans l'âme éprouver aucune convoitise-. Le principe de la concupiscence charnelle ne réside donc pas exclusivement dans l'âme, à plus forte raison dans la chair: il suppose l'âme et la chair; l'âme, sans laquelle aucun plaisir ne serait perçu ; la chair, sans laquelle aucune volupté sensuelle n'existerait. Lors donc que l'Apôtre nous parle de la chair qui convoite contre l'esprit, il entend sans aucun doute les plaisirs que la chair provoque dans l'âme et lui fait goûter de concert avec elle, à l'encontre des plaisirs purement spirituels. Par exemple, l'esprit éprouve un désir sans aucun mélange de volupté ou de passions, sensuelles, « quand l'âme soupire ardemment et se sent défaillir après les parvis du Seigneur (2). » C'est un, plaisir également spirituel qu'on propose à l'âme, en disant : « Tu as désiré la sagesse; garde le commandement et le Seigneur te la donne (3). » Quand l'esprit commande aux organes et les fait docilement concourir à un désir qui n'enflamme que lui, par exemple, quand on prend un livre, quand on s'occupe à lire, à écrire, à engager ou à suivre une discussion; quand on donne un morceau de pain à un pauvre affamé, bref, quand on remplit les autres devoirs de miséricorde et de charité, la chair se montre obéissante sans irriter la concupiscence. Mais ces nobles plaisirs dont l'âme seule est capable outrent-ils en lutte avec les plaisirs que la chair fait sentir à l'âme? Alors il est vrai de dire que la chair convoite, s'élève contre l'esprit et l'esprit contre la chair.

21. Le mot chair dans ce passage n'est que l'âme agissant conformément aux suggestions de la chair, d'après l'analogie qui fait dire que l'oreille entend ou que l’oeil voit.

Qui ne sait en effet que l'âme seule entend par l'organe de l'ouïe et voit par les yeux? C'est la même figure de langage qui permet de dire une main bienfaisante, la main s'étendant en effet pour secourir autrui. Si en parlant des yeux de la foi, seuls capables d'atteindre les vérités inaccessibles aux sens, on a pu dire: « Toute chair verra le Sauveur envoyé de Dieu (1); » quoiqu'elle ne puisse le voir que par l'âme qui la fait vivre, et quoique pour voir pieusement, avec les yeux du corps, le Christ sous la forme dont il s'est revêtu pour nous, il n'y ait aucun mouvement de concupiscence, mais seulement un acte de la chair; et qu'ainsi il ne faille pas voir une pure opération de l'esprit dans ces mots : « Toute chair verra le Sauveur envoyé de Dieu (2); » combien est-il plus juste encore de dire que « la chair « convoite » lorsque l'âme abandonne le corps à la vie des sens ou même accède aux désirs de la chair; lorsqu'il n'est point au- pouvoir de l'âme d'être au-dessus de pareilles convoitises, aussi longtemps que domine dans les membres le péché, je veux dire, ce fougueux penchant à la volupté qui naît dans ce corps de mort en punition du péché an sein duquel nous naissons tous et qui fait de nous, avant le don de la grâce, des enfants de colère (3), ce péché contre lequel luttent ceux qui sont établis en grâce ? Ils ne réussissent pas sans doute à l'étouffer dans ce corps mortel ou plutôt mort, mais il l'empêchent d'y régner. Or, pour que le péché ne règne pas, il faut qu'on n'obéisse point aux désirs qu'il fait naître, je veux dire à la concupiscence que la chair rebelle irrite contre l'esprit. Delà vient que l'Apôtre ne dit pas : que le péché ne soit plus dans votre chair mortelle, il savait trop bien que le péché a pour nous un attrait qui est la suite de la corruption originelle; mais : « Que le péché ne domine plus dans votre chair mortelle, pour vous faire obéir à ses désirs déréglés et n'abandonnez par vos membres au péché comme des instruments d'iniquité (4) ».

CHAPITRE XIII. DE L'AVANTAGE QU'ON TROUVE A COMPRENDRE AINSI LA CONCUPISCENCE. — DU PÉCHÉ CHEZ LES ENFANTS.


22. Ce point de vue offre plusieurs avantages; d'abord il n'y aucune inconséquence à dire que la chair sans l'âme serait étrangère à la concupiscence ; puis on ne tombe pas dans l'erreur des Manichéens, qui, voyant avec raison que la chair sans l'âme serait étrangère à la concupiscence, ont imaginé une seconde âme, en lutte avec Dieu; laquelle gouverne la chair, et la t'ait se révolter contre l'esprit. Enfin nous ne sommes point condamnés à dire que certaines âmes pourraient se passer de la grâce de Jésus-Christ, pour répondre à. cette objection : Quel est donc ce crime qui rend si affreux pour- l'âme d'un jeune enfant le malheur de sortir du corps avant d'avoir reçu le baptême, si elle n'est coupable d'aucune faute personnelle, ou si elle ne vient pas de cette âme qui la première a péché en Adam?

23. Il n'est point ici question des enfants déjà grands auxquels on ne peut, selon quelques personnes, reprocher aucune faute, avant l'âge de quatorze ans, époque où ils entrent dans l'adolescence.

Nous serions de cet avis, si l'enfance n'avait d'autre vice que l'appétit grossier du sexe; mais qui aurait le front de soutenir que le vol, le mensonge, le parjure ne sont point des péchés, à moins d'être intéressé à voir de pareils méfaits se commettre impunément? Or, les fautes de ce genre se multiplient chez l'enfant et si elles paraissent moins graves que dans un âge plus avancé, c'est qu'on espère que la raison s'étant fortifiée avec les années, les règles de la saine morale seront mieux comprises et plus docilement pratiquées. Mais je ne veux point ici parler de ces enfants, encore qu'on les voie protester de toutes leurs forces, en actes et en parole, contre la vérité ou la justice, quand elles contrarient cet instinct de volupté qui, malgré leur âge, trouble leur âme et leur corps; et quel est le motif qui leur fera paraître légitime l'attrait pour le plaisir, la répugnance pour la douleur, sinon un amour secret du mensonge et de l'injustice? J'ai en vue les enfants plus petits, non parce qu'ils naissent trop souvent de l'adultère. La corruption des moeurs n'est point un motif pour reprocher à la nature ses bienfaits; à ce titre, en effet, il faudrait que le blé semé par un voleur ne germât pas dans la terre; il faudrait encore que l'iniquité des parents retombât sur eux, malgré leur retour au Seigneur; combien moins en seront châtiés les enfants, s'ils mènent une vie vertueuse!

CHAPITRE XIV. L'EXISTENCE DU PÉCHÉ CHEZ LES ENFANTS ET LEUR BAPTÊME PROUVENT-ILS LA PROPAGATION DES AMES?


Le problème se pose avec toute sa force, quand on se demande comment l'âme, à cet âge où (273) elle n'a encore commis aucune faute personnelle, peut être justifiée par l'obéissance d'un seul homme, si elle n'est pas coupable par la désobéissance d'un seul. Tel est le raisonnement de ceux qui prétendent que les âmes sont produites par celles des parents, bien qu'elles n'aient, comme les corps eux-mêmes, d'autre créateur que Dieu ; car ce serait une erreur de croire que les parents puissent produire même le corps sans le concours de Celui qui a dit . « Je t'ai connu avant de te former dans le sein de ta mère (1). »

24. Voici comment on leur répond. Dieu crée et donne successivement aux hommes des âmes nouvelles, afin qu'en vivant bien dans cette chair de péché issue du péché originel, et qu'en domptant la concupiscence de la chair sous l'influence de la grâce, elles acquièrent des mérites qui leur vaudront de passer à un état plus parfait avec le corps même au temps de la résurrection, et de vivre éternellement en Jésus-Christ dans la société des Anges. Mais comme l'âme est associée par une mystérieuse union à des organes de boue, périssables, ayant pour ainsi dire leur racine dans la chair du péché, il faut, pour qu'elle puisse les vivifier d'abord et les gouverner ensuite avec le temps, qu'elle soit plongée en quelque sorte dans l'oubli. Si elle était incapable de sortir de ce désordre, on pourrait alors s'en prendre au Créateur : mais puisqu'elle est capable de secouer cette torpeur, de sentir son oubli et de revenir à son Dieu; puisqu'elle peut, dis-je,. mériter les dons de sa miséricorde et de sa vérité, d'abord par une pieuse conversion, ensuite par la fidélité persévérante à garder ses commandements ; qui l'empêcherait de sortir peu-à-peu de son sommeil, de s'éveiller à la lumière intellectuelle, fin de la créature raisonnable, et de choisir la vie du bien par l'effort d'une bonne volonté? Cet effort toutefois est au dessus d'elle, sans le secours de la grâce de Dieu par l'entremise du Médiateur. Si l'homme néglige ces devoirs, il sera un autre Adam en chair comme en âme; sil les accomplit, il n'aura plus d'Adam que la chair; en vivant selon la loi de l'esprit, il purifiera des souillures du péché la chair coupable qui lui est venue d'Adam, et méritera de recouvrer un corps pur en passant par la transformation que.la résurrection fait attendre aux saints.

25. En attendant que l'âme puisse avec l'âge vivre de la vie de l'esprit; elle doit nécessairement recevoir le sacrement du Médiateur, afin qu'elle doive à la foi de ceux qui l'aiment l'affranchissement qu'elle ne peut obtenir par la sienne.

Car ce sacrement a la vertu de remettre la peine du péché originel même dans L'âge le plus tendre : sans ce secours, on ne saurait dompter dans la jeunesse la concupiscence de la chair; la chair elle-même domptée, on ne saurait entrer en possession de la vie éternelle, sans la grâce de Celui qu'on s'est appliqué à mériter. Le baptême est donc indispensable à tout nouveau-né vivant, pour arracher l'âme à la contagion de la chair de péché, laquelle ne peut rester en communication avec l'âme de l'enfant sans la rendre incapable de toute affection spirituelle. La faute originelle pèse sur l'âme même après la mort, à moins qu'elle ne l'ait expiée avant d'être sortie des liens du corps par la vertu du sacrifice unique du véritable prêtre, le sacrifice du Médiateur.

CHAPITRE XV. MÊME SUJET.

26. Et qu'arrivera-t-il, dira-t-on, si les parents par incrédulité ou par indifférence, négligent d'accomplir ce devoir ?

 

On pourrait en dire autant des personnes plus âgées; car, elles peuvent mourir subitement ou tomber malades chez des gens qui ne leur offriraient aucun moyen de recevoir le baptême. Or, ajoute-t-on, ces personnes ont de plus des fautes personnelles à expier, et, à moins d'en recevoir le pardon, il sera de toute justice quelles soient punies des fautes dont elles se seront volontairement rendues coupables en cette vie; quant à l'âme d'un enfant, à qui on ne saurait reprocher d'avoir contracté les souillures de la chair de péché, si on ne veut pas admettre qu'elle sorte de la première âme qui ait péché; comme ce n'est point sa faute, mais la nature et Dieu même qui l'ont unie au corps, pourquoi serait-elle exclue de la vie éternelle, quand l'enfant n'a point trouvé de main secourable pour le faire baptiser? Dirait-on qu'il n'en résultera pour elle rien de fâcheux? A quoi donc servirait de recevoir cette grâce, s'il n'y a aucun inconvénient à en être privé ?

27. Quelle réponse peuvent faire ceux qui prétendent que les enfants reçoivent une âme nouvelle, qu'elle n'a point été produite par celle des parents, et qu'on cherche à appuyer cette thèse (274) sur l'Écriture parce qu'on l'y trouve ou du moins qu'elle n'y est pas combattue? Je l'avoue, je ne l'ai jamais lue, ni entendu faire. Toutefois, pour ne pas négliger la cause des absents, je ne voudrais pas cacher une idée qui se présenterait à mon esprit pour défendre leur système. Or, ils pourraient encore observer que, sachant par sa prescience la vie que mènerait chaque âme, si elle restait longtemps dans le corps, Dieu accorde le bienfait du baptême à celui dont il prévoit la piété, a l'âge qui la comporte, si une raison mystérieuse n'exigeait pas qu'il mourût d'une mort prématurée. Oui c'est un mystère impénétrable pour l'intelligence humaine, ou du moins pour la mienne, qu'il naisse des enfants destinés à mourir bientôt ou même après leur naissance . mais ce mystère est tellement insondable qu'on ne peut en tirer aucune conséquence pour ou contre ces deux hypothèses. Or, comme il faut renoncer à l'opinion suivant laquelle les âmes seraient envoyées ici-bas, d'après leurs mérites dans une vie antérieure, et qu'elles seraient d'autant plus vite affranchies qu'elles auraient commis moins de fautes, pour ne pas contredire l'Apôtre qui nous assure qu'avant de naître on ne fait ni bien ni mal; on ne saurait expliquer ni dans l'hypothèse de la création successive des âmes, ni dans celle de leur propagation, par quel secret la mort arrive plus tôt pour les uns, plus tard pour les autres. C'est un mystère insondable dont on ne peut tirer parti, à nos ,yeux, pour réfuter ou pour soutenir l'une de ces deux opinions.

CHAPITRE XVI. MEME SUJET ENCORE.


28. Quand on demande à ceux qu'embarrassait déjà la mort des petits enfants, quelle peut être la nécessité de recevoir le baptême pour les âmes, si elles ne sont point sorties de celle dont la désobéissance a fait beaucoup de pécheurs, voici leur réponse : Tous sont devenus pécheurs au point de vue de la chair; sous le rapport de l'âme, ceux-là seuls deviennent pécheurs qui vivent dans le mal au lieu de faire le bien ici-bas; le baptême est donc nécessaire aux âmes en général et en particulier à celles des enfants, parce qu'il serait funeste pour elles de quitter la vie sans avoir reçu ce sacrement; car, la contagion du péché se communiquant à l'âme par la chair de péché, se glisse dans les membres et les accable d'un poids qui doit se faire sentir après la mort, si l'âme n'en est pas délivrée en cette vie par le sacrement du Médiateur; ce bienfait est accordé d'en haut à tout âme dont Dieu prévoit la pieuse existence si elle vit jusqu'à l'époque où commence la pratique de la vertu, quand il veut, par un secret particulier, qu'elle prenne naissance dans un corps pour le quitter aussitôt après. On oppose à cette réponse une objection c'est que nous sommes dans une incertitude terrible sur le salut des âmes qui, après une vie pieuse, ont rencontré la mort dans la paix de l'Eglise, si nous devons être jugés, non-seulement sur les oeuvres que nous aurons faites, mais encore sur celles que nous aurions pu faire dans l'hypothèse où notre vie se serait prolongée. Si Dieu tient compte non-seulement des fautes passées, mais encore des fautes futures et si la mort n'empêche pas la responsabilité des crimes qu'elle a prévenus, le ,juste ne gagne rien quand une mort prématurée empêche le vice de corrompre son âme (1)? Car Dieu connaît d'avance ce vice : pourquoi donc n'en fait-il pas de préférence la règle de ses jugements, si, pour empêcher que la contagion du péché originel ne gâte l'âme d'un enfant destiné à mourir, il décide qu'elle recevra le bienfait du baptême, par ce motif seul qu'il sait d'avance qu'elle mènera, si la vie se prolonge pour elle, une existence de piété et de foi?

29. Voudrait-on rejeter ce raisonnement par cela seul qu'il m'est personnel?

Eh bien que ceux qui voient dans leur hypothèse l'expression de la vérité citent des témoignages de l'Écriture, proposent des arguments qui lèvent toute équivoque, ou du moins prouvent que leur opinion ne contredit pas le passage significatif où l'Apôtre, mettant en relief la grâce qui fait notre salut, dit : «De même que tous meurent en Adam, de même tous seront vivifiés en Jésus-Christ (2), » ou celui-ci : « De même que par la désobéissance d'un seul beaucoup ont été faits pécheurs, ainsi par l'obéissance d'un seul beaucoup deviendront justes. » Par ces nombreux pécheurs, il entend tous les hommes sans exception, puisqu'il disait plus haut qu'en Adam « tous ont péché (3). » Le mot tous et l'usage d'administrer le baptême aux enfants ne permettent donc pas de faire une exception en leur faveur, disent les partisans de l'hypothèse de la propagation des âmes; et cette conséquence semble juste tant qu'on n'avance pas, pour la combattre, une proposition évidente et nullement opposée à l'Ecriture ou un témoignage de l'Ecriture même.

CHAPITRE XVII. DISCUSSION DU TEXTE DE LA SAGESSE CITÉ PLUS HAUT.

30. Examinons maintenant, dans les limites que nous trace le plan de cet ouvrage, le texte dont nous avons tout-à-l'heure ajourné la discussion : « J'étais un enfant d'heureux naturel, j'ai reçu une âme bonne, et devenant meilleur je me suis uni à un corps pur (1). »

Ce texte semble favorable à ceux qui prétendent que les âmes, loin d'être produites par celles des parents, viennent ou descendent d'en haut et sont envoyées par Dieu dans le corps; en revanche, les expressions : «J'ai reçu une âme bonne, » ne laissent pas d'être fort embarrassantes pour eux : car, ils croient sans aucun doute que les âmes envoyées par Dieu dans, les corps sortent d'une source unique dont elles sont comme autant de ruisseaux ou du moins sont de la même espèce, ils n'admettent pas que les unes soient bonnes ou meilleures, les autres mauvaises ou pires encore. D'où viennent en effet les différences qui rendent les âmes bonnes ou mauvaises, à divers degrés, sinon des habitudes librement contractées ou des tempéraments, qui font plus ou moins plier l'âme « sous le poids de ce corps corrompu qui est un faix pour l'âme (2) ? » Or, aucune âme, avant de descendre dans le corps, n'a contracté d'habitudes en vertu d'actes personnels, et ce n'est pas en songeant à un corps moins lourd que l'auteur de ce passage a pu dire de lui-même : « J'étais un enfant d'heureux naturel, j'ai reçu une âme bonne et devenant meilleur je me suis uni à un corps pur. » Ainsi il était bon avant de descendre dans un corps, mais cette bonté ne tenait ni à, la différence des moeurs, puisqu'il n'avait point acquis de mérites dans une existence antérieure, ni à quelque différence dans le corps, puisqu'il était bon avant d'y descendre. A quoi tenait-elle donc ?

31. Pour les partisans de la transmission des âmes, le texte, à part les expressions : « Je me suis uni à un corps, »se concilie bien avec leur opinion.

L'auteur, en effet, après avoir dit: « J'étais un enfant d'heureux naturel, » ajoute immédiatement : « et j'ai reçu une âme bonne, » pour montrer les causes auxquelles tenait cet avantage, c'est-à-dire, le caractère de son père ou son tempérament. Quant aux expressions : « Et devenant meilleur je me suis uni à un corps pur, » on peut les entendre de sa mère et les concilier avec celles qui précèdent; car, étant admis qu'il est sorti de l'âme et du corps de son père pour entrer dans les entrailles sans souillure de sa mère, on peut conclure qu'il n'a point été conçu dans ce flux de sang qui, dit-on, communique à l'enfant un esprit lourd, ou dans l'impudicité de l'adultère. Par conséquent, ou ce texte de la Sagesse est plus favorable à l'hypothèse de la transmission des âmes, ou il ne prouve ni pour ni contre, si l'on réussit à l'interpréter aussi d'après l'opinion contraire.

CHAPITRE XVIII. DE L’AME DU CHRIST : LE TEXTE PRÉCÉDENT LA CONCERNE-T-IL?

32. Si l'on veut appliquer ces paroles au Seigneur, sous le rapport de la nature humaine revêtue par le Verbe, on trouve dans le contexte des traits qui ne conviennent guère à une si haute majesté, principalement cet aveu que fait l'auteur un peu plus haut, lorsqu'il dit : « qu'il est né de la semence d'un homme épaissie dans le sang (1). »

Ce n'est point ainsi qu'est né le Fils de la Vierge, dont l'incarnation, comme aucun chrétien n'en doute, s'est faite sans le concours d'un homme. Sans doute quand le Psalmiste dit : «Ils ont percé mes pieds et mes mains et ils ont compté tous mes os; ils m'ont regardé, considéré; ils se sont partagé mes vêtements et ont jeté le sort sur ma robe, » ces traits ne conviennent qu'à Jésus-Christ; mais il dit au même endroit : « Mon Dieu, regardez-moi, pourquoi m'avez-vous abandonné ? La voix de mes péchés éloigne ma délivrance (2); » et ces paroles ne lui conviennent qu'en tant, qu'il représente notre corps dégradé, parce que nous sommes les membres de son corps. Il est dit dans l'Evangile, même: « L'enfant croissait en âge et en sagesse. » Or, si quelques expressions, qui avoisinent dans le livre de la Sagesse le texte que nous citons, peuvent s'appliquer à Notre-Seigneur, parce qu'il a pris les humbles dehors de l'esclavage et que le corps de l'Eglise devient un par son union avec son Chef, je le demande, peut-on concevoir un enfant de plus heureux naturel que celui dont les vieillards admiraient la sagesse à douze ans (1)? Y a-t-il une âme meilleure que la sienne? Quand bien même l'hypothèse de la transmission des âmes serait prouvée au lieu d'être débattue, on ne devrait pas pour ce motif croire l'âme issue de l'âme du premier prévaricateur, puisque autrement la désobéissance d'un seul ferait un pécheur de celui-là même qui par son obéissance en a affranchi beaucoup de la condamnation et les a justifiés ? Quel sein est plus chaste que celui de cette Vierge qui, tout en ayant pris son corps à la tige du péché, a conçu en dehors de toute communication avec le péché, en sorte que le Christ a pris naissance dans ses entrailles sans être soumis a la loi qui, inhérente aux organes de ce corps de mort, contredit celle de l'esprit ? C'est cette loi que les saints de l'ancien Testament ont dominée dans le mariage, et n'ont laissé agir qu'autant qu'il le fallait dans l'intérêt de l’espèce. Tout en s'incarnant dans une femme, conçue d'après le mode dont la chair de péché se transmet, comme sa conception s'est accomplie autrement que celle de sa mère, sa chair, loin d'être corrompue par le péché, n'en a pris que la ressemblance. S'il a été condamné à mourir, ce n'est point à cause de ces mouvements involontaires, quoique la volonté doive les dominer, qui éclatent dans la chair et qui s'élèvent contre l'esprit (2) : il n'a pas pris un corps seulement pour arrêter la contagion du péché, mais, pour payer à la mort le tribut qu'il ne devait pas, et pour faire briller à nos yeux les promesses de la résurrection :c'est ainsi qu'il nous a tout ensemble délivrés de la crainte et donné l'espérance.

33. Du reste, si on me demande où Jésus-Christ a puisé son âme, j'avoue que sur ce sujet j'aimerais mieux écouter des personnes plus vertueuses ou plus habiles que moi : toutefois, s'il faut répondre, je dirai selon la portée de mon esprit, qu'il la tient, non d'Adam, mais du principe même dont la tient Adam. Si la poussière empruntée à la terre a pu s'animer sous un souffle divin sans aucune intervention de l'homme, le corps emprunté à une chair virginale ne devait-il pas à plus forte raison obtenir une âme bonne, quand il s'agissait, ici, d'élever celui qui devait tomber ; là, de faire descendre celui qui devait nous relever? Peut-être, si cette pensée toutefois peut s'appliquer au Christ, le mot sortitus sum a-t-il été employé parce que les dons du hasard ne sont d'ordinaire que les dons de la Providence : ou plutôt, comme on peut le dire avec confiance, cette expression a été choisie en vue de nous montrer que des oeuvres antérieures n'on point élevé à cette grandeur sublime l'âme avec laquelle le Verbe s'est fait chair pour habiter parmi nous (1), le mot sortiri excluant tout mérite dans une vie antérieure.

CHAPITRE XIX. L’AME DU CHRIST N’ETAIT POINT DANS ABRAHAM; ELLE N'EST POINT VENUE PAR TRANSMISSION.

 

34. L'Epître aux Hébreux renferme un passage qui mérite toute notre attention.

L'Apôtre montre la différence qui sépare la sacerdoce de Lévi du sacerdoce du Christ, sous l'emblème prophétique du grand-prêtre Melchisédech : « Considérez, dit-il, combien grand a dû être celui à qui le patriarche Abraham lui-même a donné la dîme des plus riches dépouilles. Ceux des enfants de Lévi qui ont reçu le sacerdoce ont ordre, d'après la loi, de lever les dîmes sur tout le peuple, c'est-à-dire, sur leurs frères, quoique sortis comme eux du sang d'Abraham. Et voilà que celui qui ne partage point avec eux la même origine, a pris les dîmes d'Abraham lui-même, et il a béni celui à qui les promesses avaient été faites. Or c'est une maxime incontestable que celui qui bénit est au-dessus de celui qui reçoit la bénédiction. De plus, quand il s'agit des Lévites, ce sont des hommes mortels qui reçoivent la dîme, et quand il s'agit de Melchisédech, c'est un homme que l'Ecriture nous représente comme toujours vivant. Si j'ose le dire, Lévi, qui reçoit la dîme, l'a en quelque sorte payée dans la personne d'Abraham : car il était renfermé en son aïeul (2).» Si donc la prééminence du sacerdoce de Jésus-Christ sur le sacerdoce de Lévi éclate dans ce fait, que celui qui reçut la dîme d'Abraham, en qui Lévi la paya lui-même, était la figure de Jésus-Christ comme prêtre, il faut reconnaître que le Sauveur n'a point payé la dîme en la personne d'Abraham;et si Lévi paya la dîme, parce qu'il était renfermé dans Abraham, le Christ ne l'a point payée, par ce qu'il n'était pas renfermé dans sa personne. Est-ce le corps de Lévi, et non son âme, qui était implicitement renfermé dans la personne d'Abraham ? A ce titre, le Christ y était également compris, puisqu'il est selon la chair de la race d'Abraham, et à ce titre aussi, il a payé la dîme.

En prouvant donc la supériorité du sacerdoce de Jésus-Christ sur celui de Lévi parce que Lévi paya la dîme à Melchisédech dans la personne d'Abraham, qui renfermait également le Christ et par conséquent payait la dîme pour lui, que veut-on nous révéler sinon que le Christ n'était pas renfermé tout entier dans Abraham? Or, peut-on dire que son corps n'y était pas implicitement compris? C'est donc son âme qui en était absente. Par conséquent l'âme coupable d'Adam n'a point fourni, par voie de transmission, l'âme du Christ ; autrement elle eût été comprise dans la personne d'Abraham.

CHAPITRE XX. RÉPONSE QU'ON POURRAIT FAIRE DANS L'HYPOTHÈSE DE LA TRANSMISSION DES AMES.


35. Les partisans de la propagation des âmes se montrent ici et prétendent que leur système est démontré, s'il est prouvé que Lévi, même avec son âme, était renfermé dans la personne d'Abraham, qui paya la dîme à Melchisédech pour son petit-fils, et qu'on puisse distinguer le Christ d'avec Lévi à propos de cette offrande : or, le Christ n'ayant point payé la dîme, tout en étant renfermé dans la personne d'Abraham selon la chair, il faut admettre que son âme n'y était pas comprise, et que celle de Lévi y était renfermée. Pour moi, cet argument me touche peu; je suis plus disposé à entendre les deux parties qu'à me prononcer pour Tune on pour l'autre. Ce que je me suis proposé en citant ce passage, c'est de prouver que l'âme du Christ n'a point pris naissance par transmission. Parmi les adversaires de cette transmission quelques-uns répondront peut-être à cet argument et feront valoir un raisonnement qui n'est pas sans importance à mes yeux, le voici : Bien qu'aucune âme ne soit renfermée dans les reins d'un père, Lévi fut toutefois selon la chair renfermé dans ceux d'Abraham en la personne duquel il paya la dîme; le Christ y fut également renfermé selon la chair tout en restant exempt de ce tribut. En effet Abraham contenait Lévi dans ses reins d'après le principe qui fait sortir un enfant du germe déposé par le père dans le sein maternel; mais comme la conception du Christ se fit en dehors de cette loi, son corps ne fut point renfermé; au même titre que Lévi dans la personne d'Abraham, encore que Marie en soit issue. Par conséquent ni Lévi ni le Christ ne furent enfermés dans les reins d'Abraham sous le rapport de l'âme : ils ne le furent que sous le rapport de la chair, avec cette différence que Lévi dut sa naissance aux désirs de la chair, tandis que le Christ ne prit dans le sein de sa mère que la substance de son corps. La semence en effet se compose à la fois d'une substance corporelle et d'un principe invisible; elle s,'est transmise ainsi d'Abraham ou plutôt d'Adam au corps de Marie, dont la conception et la naissance ont été soumises à cette loi. Quant au Christ, il a pris la substance visible de sa chair dans celle d'une vierge, mais le principe de sa conception, loin de dépendre d'un homme, a été tout surnaturel. Il a donc été renfermé dans les reins d'Abraham pour le corps qu'il a reçu de sa mère.

36. Ainsi Lévi a payé la dîme dans la personne d'Abraham, mais n'a été dans ses reins qu'au point de vue de la chair et au mime titre qu'Abraham lui même avait été renfermé dans ceux de son père:

en effet il est né d'un père comme Abraham, en vertu de la loi qui soulève la chair contre l'esprit et de l'invisible concupiscence, qu'une légitime et chaste union ne laisse s'exercer que dans l'intérêt de la reproduction de l'espèce; mais le Christ n’a pu payer la dîme en la personne d'Abraham, puisque sa conception loin d'y avoir puisé la blessure en a tiré le remède. La dîme même étant une figure de ce remède divin, le malade, non le médecin, a dû payer le tribut dans la personne d'Abraham. Car le corps d'Abraham, et même celui du premier homme formé de la terre, contenaient tout ensemble la plaie du péché et le remède pour la guérir; la plaie, c'est-à-dire cette loi qui soulève la chair contré la loi de l'esprit et qui va se communiquant d'homme à homme, comme si elle se gravait successivement ; le remède, c'est-à-dire ce corps conçu et formé dans le sein d'une vierge sans concupiscence, par une pure incarnation, afin de pouvoir mourir malgré son innocence et de nous donner un gage sûr de la résurrection. L'âme du Christ n'est donc point née par transmission de la première âme coupable; c'est un point que doivent admettre ceux mêmes qui croient à la propagation des âmes. Car, d'après eux, cette propagation se produit par l'acte générateur du père: or la conception du Christ est en dehors de la génération ordinaire. D'ailleurs s'il avait été compris avec son âme dans la personne d'Abraham, il aurait payé lui-même la dîme, ce qui est contraire au témoignage de l'Ecriture, puisqu'elle établit sur ce principe même la prééminence du sacerdoce de Jésus-Christ sur le sacerdoce de Lévi.

CHAPITRE XXI. IL SERAIT IMPOSSIBLE QUE LE CHRIST N'EUT PAS PAYÉ LA DIME, S'IL AVAIT ÉTÉ RENFERMÉ AVE SON AME DANS LA PERSONNE D'ABRAHAM.


37. On va peut-être me dire: Si le Christ a pu être implicitement renfermé avec son corps dan la personne d'Abraham sans être soumis à la dîme, pourquoi n'aurait-il pu y être également avec son âme sans être condamné à ce tribut Je réponds : parce que, la substance de l'âme étant simple, il est impossible qu'elle s'accroisse comme font les corps; c'est un point que reconnaissent les auteurs mêmes qui considèrent l'âme comme corporelle, opinion à laquelle appartiennent la plupart de ceux qui croient, que les âme sont produites de celles des parents. Or, dans la semence d'où naît le corps il peut y avoir un principe invisible, destiné à présider à son développement harmonieux, principe que l'intelligence et non les yeux, distingue de la matière visible et palpable. Le volume même du corps humain par sa disproportion avec le germe dont il vient fait assez voir qu'il est possible d'emprunter a corps des éléments qui contiennent la matière visible et non l'invisible principe de la reproduction, comme l'a fait le Christ, dont la chair s'est formée par un effet surnaturel, sans se propager aux dépens d'un père et d'une mère. Mais qui oserait dire de l'âme qu'elle contient un germe composé à la fois d'une matière visible et d'un principe invisible? Du reste à quoi bon se travailler pour formuler une vérité que la parole toute seule est incapable de démontrer, à moins qu'on ne s'adresse à un esprit vif qui devance la parole et qui n'attend pas tout de la clarté des mots ? Voici donc ma conclusion : Si l'âme du Christ s'est formée d'une autre âme, comme on l'a cru peut-être, quand nous ne parlions que de son corps, elle s'en est propagée sans contracter la souillure originelle; mais si elle n'a pu s'en propager sans contracter cette tache, c'est qu'elle n'en vient pas. Quant à la question de savoir si les autres âmes viennent des parents ou d'en haut, le démontre qui pourra. Je flotte d'une opinion à l'autre, sans pouvoir fixer ma pensée, ferme uniquement sur ce point,que l'âme n'est ni un corps, ni une organisation ou, comme disent les Grecs l'harmonie de parties matérielles ; voile ce que tout le verbiage du monde ne fera jamais entrer dans mon esprit aidé de la grâce de Dieu.

CHAPITRE XXII. D'UN PASSAGE DE SAINT JEAN: PEUT-IL S'EXPLIQUER DANS LES DEUX HYPOTHÈSES?

38. Il y a dans l'Ecriture un autre passage que nous ne devons pas oublier et sur lequel peuvent s'appuyer ceux qui prétendent que les âmes viennent d'en haut; le Seigneur a dit lui-même ?

« Ce qui est né de la chair est chair, ce qui est né de l'esprit est esprit (1). » Peut-on trouver un témoignage plus précis, dit-on, pour prouver que l'âme né naît pas de la chair ? Qu'est-ce en effet que l'âme, sinon l'esprit de vie, créé et non créateur? A ce raisonnement les adversaires en opposent un autre. Eh! prétendons-nous autre chose, s'écrient-ils, nous qui disons que la chair vient de la chair, l'âme de l'âme? L'homme en effet est composé d'un corps et d'une âme, et nous soutenons que le corps naît du corps par la génération, l'esprit de l'esprit par la concupiscence. Encore oublient-ils de nous dire que les paroles du Seigneur ont trait, non à la génération matérielle, mais à la régénération spirituelle.

CHAPITRE XXIII. QUELLE EST L'HYPOTHÈSE LA PLUS VRAISEMBLABLE? DE LA COUTUME OU EST L'EGLISE DE BAPTISER LES ENFANTS.


39. Après cette discussion, telle que nous l'ont permise et le temps et nos forces, je conclurais que les raisonnements et les témoignages de l'Ecriture ont une valeur égale ou presque égale dans les deux hypothèses, si la coutume où est l’Eglise de baptiser les petits enfants, ne me faisait pencher en faveur de l'opinion selon laquelle les âmes émanent de celles des parents; je ne vois aucune réponse à faire à cette opinion sur ce point; si Dieu m'envoie ensuite quelque lumière, s'il accorde même la grâce d'écrire aux docteurs qui se préoccupent- de ces questions, je le verrai avec plaisir. Aujourd'hui toutefois je déclare que l'argument tiré du baptême des petits enfants est très-sérieux, afin qu'on s'occupe de le réfuter, s'il est faux. Car, ou nous devons abandonner cette question et croire qu'il suffit pour la foi de savoir le but où nous conduira une vie pieuse, sans connaître notre origine; ou l'âme intelligente est portée avec ardeur à sonder un problème qui la touche : alors, mettons de côté toute obstination dans le débat; faisons nos recherches avec conscience, demandons avec humilité, frappons avec persévérance. Si cette connaissance nous est utile, Celui qui sait mieux que nous ce qu’il nous faut nous l'accordera, lui qui donne ce qui leur est bon à ses enfants (1). Toutefois l'usage où l'Eglise, notre mère, est de baptiser les enfants, doit être pris en sérieuse considération : il ne faut ni le regarder comme inutile, ni croire qu'il n'est pas une tradition des Apôtres. Cet âge tendre offre un argument d'autant plus sérieux, que le premier il a eu le bonheur de verser son sang pour le Christ.

CHAPITRE XXIV. CONSÉQUENCE QUE DOIVENT ÉVITER LES PARTISANS DE LA PROPAGATION DES AMES.

40. J'avertis de tout mon pouvoir les partisans de ta propagation des âmes et je les prie de bien s'examiner eux-mêmes, afin qu'ils se convainquent que leur âme n'est point un corps.

Il n'est effectivement aucune substance qui, par une étude attentive, révèle mieux à l'esprit le Dieu souverain et immuable, que celle qu'il a faite à son image : d'autre part, on est bien près de croire que Dieu est un corps, on y arrive peut-être logiquement, lorsqu'on admet que l'âme est corporelle. Accoutumé à la vie et aux opérations des sens, on ne veut pas croire que l'âme soit d'une autre nature que le corps, dans la crainte qu'elle ne soit plus rien : à plus forte raison, plus on craint que Dieu n'existe pas, plus on craint de lui retisser un corps. L'imagination entraîne ces sensualistes avec tant de force vers les représentations réelles ou chimériques que l'esprit se forme à propos des corps, que sans ces représentations ils redoutent de se perdre dans- le vide ; de là vient qu'ils se figurent nécessairement la justice et la sagesse sous des formes et des. couleurs, car ils ne peuvent les concevoir d'une manière purement spirituelle; et pourtant, quand la sagesse et la justice excitent leur admiration ou leur inspirent quelques actes, ils ne disent point le coloris, les traits, la taille, les formes qui ont frappé leurs regards. C'est un sujet que nous avons déjà traité ailleurs et que nous traiterons encore, s'il plaît à Dieu. Ainsi donc, que l'on regarde comme une certitude l'hypothèse de la transmission des âmes ou qu'on reste dans le doute, on ne doit jamais aller jusqu'à croire ou dire que l'âme est matérielle, surtout pour éviter de se figurer Dieu comme un corps; puisque, malgré sa perfection, malgré le privilège de surpasser tous les êtres par son essence, il n'en serait pas moins un corps.

CHAPITRE XXV. ERREUR DE TERTULLIEN SUR LA NATURE DE L’AME.

 

41. Aussi quand Tertullien a cru l'âme corporelle, c'est qu'il n'a pu la concevoir comme une substance simple, et qu'il aurait eu peur de l'annihiler en n'en faisant pas un corps; et conséquemment il a été incapable de se former sur Dieu une autre opinion.

Mais comme son génie est perçant, il découvre parfois la vérité en dépit de son système. Quoi de plus vrai que ce principe qu'il formule dans un de ses ouvrages : « Tout ce qui est corporel est passible (1) ? » Par conséquent, il aurait dû renoncer à l'opinion qui lui faisait dire un peu plus haut que Dieu est un corps : je ne saurais croire, en effet, qu'il ait perdu le sens au point d'admettre que la substance de Dieu fût passible et de faire non-seulement du Christ avec sa chair, avec sa chair et son âme, mais encore du Verbe par qui tout a été fait, un être passible et susceptible de changer : pour un esprit chrétien ce serait une impiété. Ailleurs, après avoir attribué à l'âme la transparence de l'air et de la lumière, il arrive aux sens, dont il essaie de faire comme les organes de l'âme, et il dit : « Il y a l'homme intérieur et l'homme extérieur, un en deux : le premier a aussi ses yeux, ses oreilles, au moyen desquels le peuple a du voir et entendre le Seigneur; il possède enfin tous les organes nécessaires pour la pensée et pour les visions des songes (2). »

42. Ainsi les yeux et les oreilles qui ont permis au peuple de voir et d'entendre le Seigneur, sont ceux qui permettent à l'âme d'avoir des songes.

Et pourtant, si vous aviez vu Tertullien en songe, il vous soutiendrait que vous ne l'avez ni vu ni entretenu, à moins de vous avoir vu à son tour. Enfin supposons que l'âme se voie elle-même en songe, quand les membres du corps sont immobiles et qu'elle prend l'essor à la suite des fantômes qu'elle aperçoit: l'a-t-on jamais vue sous une forme diaphane et brillante, à moins de la voir comme tout le reste, par une illusion trompeuse? Cette illusion est possible sans doute; mais à Dieu ne plaise que dans la veille on la croie une réalité ! autrement, quand on la verrait sous mie forme différente et moins éloignée des idées communes, il faudrait admettre ou qu'elle s'est changée, ou que, loin de voir sa substance véritable, on ne voit plus que l'image immatérielle d'un corps, analogue aux fantômes de l'imagination. Est-il un Ethiopien qui dans ses rêves ne se voie presque toujours avec un teint noir, et qui ne s'étonne, à son réveil, s'il s'est vu avec un autre teint? Or, je crois fort qu'il ne se serait jamais vu sous une couleur diaphane, s'il n'en avait jamais entendu parler ou si quelque livre ne l'en avait instruit.

43. Ajouterai-je que ces hommes, égarés par leur imagination, veulent nous imposer de par l'Écriture l'opinion que Dieu lui-même est matériel, tel qu'il a été révélé en figure aux esprits des saints ou tel qu'on le dépeint dans un langage allégorique?

Car c'est là que vient aboutir leur système. Leur erreur consiste à traduire par des images leur fausse opinion, et ils ne comprennent pas que les saints ont considéré leurs visions, comme ils les considéreraient aujourd'hui, s'ils lisaient dans l'Écriture, ou s'ils entendaient dire qu'elles étaient un symbole, comme les sept épis et les sept vaches désignaient sept années (1); comme la nappe suspendue par les quatre coins, où il y avait des animaux de toute espèce, qui représentaient la terre avec les divers peuples qui l'habitent (2). A plus forte raison faut-il s'expliquer ainsi les idées toutes spirituelles qui sont représentées par des images, au lieu d'y voir des êtres réels.

CHAPITRE XXVI. DE L'ACCROISSEMENT DE L’AME D'APRÈS TERTULLIEN.

 

44. Toutefois Tertullien n'admet pas que l'âme croisse comme le corps: « Je craindrais, dit-il, qu'on ne la crût susceptible de décroître, et par conséquent de s'anéantir. »

Mais comme il y voit une substance étendue par tout le corps, il ne découvre pas à quelle conséquence aboutissent, des accroissements qui, selon lui, développent un faible germe et le proportionnent au volume même du corps. Voici ses paroles: « La force qui constitue l'âme et où s'amassent, comme dans un trésor, les économies de la nature, s'étend insensiblement avec le corps, sans que le volume de substance, qui est le principe de son accroissement, s'altère et diminue. » Ces expressions resteraient peut-être obscures, sans une comparaison qui y jette quelque lumière : « Supposez, dit-il, un lingot d'or ou d'argent; les formes qu'il recevra y sont comme ramassées et seront peut-être moindres, quoique son volume contienne tout ce qu'il y a en lui d'or ou d'argent. Quand il s'allonge en minces lames, il s'augmente par l'étendue même qu'acquiert son poids invariable: il s'allonge sans être grossi par des éléments étrangers, sans s'accroître, et pourtant c'est s'accroître que de s'étendre ainsi. Le volume en effet peut s'accroître, le poids restant le même. Alors apparaît l'éclat du métal, jusque-là caché, quoique réel, au sein du lingot; alors se montrent toutes les formes que sa ductilité le rend susceptible de prendre sous la main qui le façonne et qui n'ajoute à son poids qu'une empreinte. Il en est de même de l'âme; ses accroissements sont une augmentation de volume et non de substance. »

45. Comment concevoir tant d'éloquence unie à de pareilles chimères? Exemple singulier, qui provoque plutôt l'effroi que le rire.

Tertullien en serait-il venu là, s'il avait pu concevoir l'existence indépendamment du corps? Y a-t-il rien de plus illogique que de s'imaginer une masse de métal susceptible de s'étendre sous le laminoir sans diminuer à d'autres égards, ou de s'accroître en longueur sans rien perdre de son épaisseur? Est-il possible qu'au corps, qui conserve la même nature, s'accroisse dans toutes les dimensions sans devenir plus léger? Comment donc l'âme pourrait-elle tirer d'un germe presque imperceptible un accroissement proportionné à la grandeur du corps qu'elle anime, si elle n'est qu'un corps dont la substance ne reçoit rien du dehors pour s'accroître ? Comment, dis-je, pourrait-elle remplir la chair qu'elle vivifie, sans s'exténuer à proportion que le corps grandit? Il a craint que l'âme ne s'anéantit, si elle ne diminuait en s'accroissant, et il n'a pas craint qu'elle s'anéantît en s'exténuant à mesure qu'elle s'accroîtrait. Mais à quoi bon prolonger une discussion, qui devrait être déjà terminée, puisque l'on sait ma pensée, les points sur les quels je suis fixé, mes doutes et leur raison ? Terminons donc ici ce livre et passons au suivant.

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