(traduction du manuscrit arabe de PARIS N° 150, FOL. 157)
Au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit, Dieu unique. Gloire à lui !
Nous commençons, avec l'aide de Dieu le Très-Haut et sous sa direction excellente, le récit de la dormition de Notre-Dame, la Vierge pure et sainte, Marie, Mère de notre Seigneur et Dieu, notre Sauveur Jésus-Christ.
Nous exposerons comment elle passa de ce monde périssable à la vie éternelle et au bonheur qui ne finit point, le vingt et unième jour du mois de Toubat (1) ; que ses prières nous gardent de toutes les tentations de l'ennemi pervers ! Amen.
Nous en devons la connaissance à saint Jean le Théologien, l'un des disciples de Notre-Seigneur Jésus-Christ (gloire à Lui !), et l'un de ceux qui annoncèrent le saint Évangile. Il rapporte que Notre-Dame, la Vierge pure et sainte, Marie, visitait régulièrement le tombeau de son Fils bien-aimé, Jésus-Christ (à Lui la gloire !), et y priait en glorifiant son saint Nom. Elle y allait selon son habitude, quand il plut à notre Seigneur et Sauveur Jésus-Christ de la rappeler à Lui. Elle y était restée en prière, levant (f. 157, b) les mains vers Lui, et Lui demandant de l'enlever de ce monde.
À ce moment, un Juif qui avait remarqué ses visites régulières au saint tombeau chaque jour, et les longues prières qu'elle y faisait, alla trouver les princes des prêtres et les informa de ce que faisait la sainte Mère de notre Dieu. Or, les princes des prêtres avaient placé des gardes près du sépulcre pour empêcher d'y accéder et d'y chercher des bénédictions. Ils envoyèrent demander à ceux qui gardaient le tombeau des explications sur ce qu'ils venaient d'apprendre. Mais les gardes nièrent catégoriquement cela, et affirmèrent par serment qu'ils n'avaient laissé personne arriver au tombeau. C'est que le Seigneur Christ, notre Dieu, avait empêché les gardes de voir la Vierge pure et l'avait voilée à leurs regards.
Quand le vendredi fut arrivé, la Vierge sainte et pure alla au saint tombeau selon son habitude, pour y louer le Seigneur Christ et Le prier.
Pendant qu'elle était en prière, les cieux s'ouvrirent devant elle, et l'ange glorieux, (f. 158, a) le chef des anges, Gabriel, descendit vers elle pour lui porter le message divin, et il lui dit : « Réjouis-toi, ô pleine de grâce (1), tes prières sont montées jusqu'au Seigneur Christ qui est né de toi, et Il a exaucé ta demande, car le moment est venu pour toi de passer de ce monde à la vie éternelle. »
Après avoir entendu ces paroles de l'ange, elle alla à Bethléem et emmena avec elle trois vierges pures et saintes, qui étaient attachées à son service. Quarante jours après, elle dit à ses serviteurs : « Apportez-moi un encensoir avec de l'encens. » Ils lui apportèrent ce qu'elle demandait. Elle mit alors de l'encens dans l'encensoir et pria en ces termes : « Ô mon Seigneur et mon Dieu, Jésus-Christ, qui as daigné t'incarner dans ta servante, par un mystère incompréhensible, pour venir dans le monde afin d'être le Médiateur des hommes et de porter leurs péchés, exauce-moi en ce moment et envoie-moi ton serviteur Jean, ton disciple qui a prêché ton Nom, afin que je jouisse de sa présence ; envoie-moi de même tous tes disciples, ceux qui sont vivants comme ceux qui sont morts. J'ai confiance que tu m'exauceras et que tu accompliras ma demande. »
À peine la Vierge pure avait-elle fini (f. 158, b) de prier, que moi, Jean, je fus enlevé de la ville d'Éphèse par une nuée lumineuse qui me déposa devant Marie, ma Dame sainte ; et au moment où je fus placé devant elle, elle était en train de louer mon Seigneur Jésus-Christ. Je lui dis : « Dis-moi ce qu'il y a, ô Vierge pure et sainte, qui as enfanté pour nous Notre-Seigneur Jésus-Christ. » À ce moment, l'Esprit-Saint parla par ma bouche et je lui dis : « Tu vas sortir de ce monde dans une gloire magnifique et après de nombreux prodiges que Notre-Seigneur Jésus-Christ manifestera en toi pour la gloire de son saint Nom. »
À ce moment, la Vierge se rappela la parole que lui dit Notre-Seigneur quand Il était sur la Croix : « Femme, voilà votre Fils (2), » et elle regarda le disciple et lui dit : « Ô Jean, donne-moi l'encensoir avec l'encens et prie sur moi. » Jean fit ce qu'elle lui disait, il mit de l'encens et pria sur elle, puis il dit : « Ô mon Dieu et mon Seigneur Jésus-Christ, qui accomplis des merveilles et dont la grande miséricorde ne peut se décrire, montre maintenant ta puissance merveilleuse dans ta Mère et fais-la sortir (f. 159, a) de ce monde avec une grande gloire, selon la promesse que tu lui as faite, afin que ceux qui t'ont crucifié et ont refusé de croire en toi soient remplis de confusion et de crainte. »
Je fis alors ce que la Mère de Notre-Seigneur Jésus-Christ m'avait ordonné. Elle prit alors l'encensoir de mes mains, y mit de l'encens et pria ainsi : « Je te rends grâces, ô mon Seigneur et mon Dieu, Jésus-Christ, Fils du Dieu éternel et vivant avant tous les siècles, parce que tu m'as accordé ce que tu m'avais promis et que tu me fais la grâce de m'élever au plus haut des cieux, dans une gloire qui ne finira jamais, au moment où mon âme sortira de mon corps. »
Tu m'avais promis aussi que tes disciples purs et tes apôtres saints seraient présents au moment où tu recevrais mon esprit. »
À ce moment, l'Esprit-Saint parla par ma bouche à moi, Jean, et je lui dis : « Ma Dame, ton Fils bien-aimé vient à toi, comme il te l'a promis. » Elle me regarda alors et dit : « Jean, les Juifs pervers ont résolu de brûler mon corps après ma mort. » Je lui répondis : « Ma Souveraine, réjouis-toi et tressaille d'allégresse, parce que ton corps ne verra pas la corruption, le feu ne pourra le brûler, et personne n'aura le pouvoir de toucher jamais ton corps. »
Elle me dit alors : (fol. 159, b) « Prends l'encensoir dans ta main, mets-y de l'encens et prie à voix basse. » Je fis ce qu'elle m'ordonnait, et j'entendis une voix qui venait du ciel me dire : « Les disciples du Christ, tes frères, seront en ce lieu à cette heure même. » Et, en effet, pendant que je priais, comme me l'avait ordonné Notre-Dame, la Mère de lumière, voici qu'une nuée déposa Pierre, le chef des apôtres, qui venait de la ville de Rome, et Paul, le docteur, qui venait d'Afrique, ainsi que Jacques, de Jérusalem, André, Philippe, Luc et les autres disciples qui vivaient encore, et ceux qui dormaient.
L'Esprit-Saint leur dit : « Levez-vous sans plus tarder ; ne croyez pas pourtant que l'heure de la Résurrection soit arrivée, mais allez saluer la Mère de la vie, la Dame de pureté, avant qu'elle soit transportée de ce monde aux cieux. »
Marc arriva de même de la ville d'Alexandrie avec le reste des apôtres, pendant que Pierre était enlevé entre les nuées et la terre, selon l'ordre qu'il avait reçu du Saint-Esprit. Tous les disciples suivirent Pierre dans les nuées et s'arrêtèrent en présence de Notre-Dame. Ils se prosternèrent devant elle et lui dirent : « Réjouis-toi, ô Dame de pureté, parce que le Saint qui est né de toi (1) (f. 160, a), notre Seigneur et Dieu, Jésus-Christ, va t'enlever de ce monde avec une grande gloire, selon la promesse qu'il t'a faite. »
Quand Notre-Dame entendit la parole des disciples et les aperçut, elle s'assit sur son lit et leur dit : « Je vois maintenant avec certitude que votre Maître, mon Dieu et le vôtre, va se présenter à moi, et je le verrai comme je vous vois, puis je quitterai ce monde. Mais dites-moi comment vous êtes venus si vite vers moi ; pourtant, mon Dieu ne cache jamais rien. »
Pierre et tous les disciples lui répondirent : « C'est le Saint-Esprit qui nous en a informés et nous a ordonné de venir. » Jean ajouta : « Au moment où j'allais à l'autel pour accomplir les mystères vivificateurs, l'Esprit-Saint me dit : "Le moment approche où la Mère du Christ va quitter son corps ; va à Bethléem pour la saluer." Aussitôt, un nuage lumineux m'enleva et me déposa ici, en ce lieu. »
Pierre reprit : « J'étais à Rome au moment de l'aurore, quand j'entendis l'Esprit-Saint me dire : "La Mère de ton Seigneur est sur le point de quitter ce monde ; va vite à Bethléem pour la saluer." Et aussitôt une nuée céleste m'enleva. Je vis tous les disciples assis sur des nuées, et j'entendis une voix qui leur disait : "Allez tous à Bethléem." »
Paul dit alors : « J'étais dans une région éloignée de Rome, appelée Afrâqiâ (Afrique), quand j'entendis l'Esprit-Saint me dire : "La Mère de ton Seigneur le Christ quitte ce monde et part pour le royaume des cieux ; va la saluer." Et à l'instant une nuée m'enleva et m'apporta ici. »
Marc dit à son tour : « Je vaquais à la prière, à cette heure-là, dans la ville d'Alexandrie ; au moment où je finissais ma prière, l'Esprit-Saint m'enleva sur une nuée et me déposa près de vous. » Jacques dit également : « Je me trouvais à Jérusalem quand l'Esprit-Saint me dit la même chose, m'enleva sur une nuée et m'apporta ici. » Matthieu ajouta : « J'étais sur un navire en danger de faire naufrage à cause de la force et de la violence des vagues, sur la mer en furie, quand une nuée lumineuse m'enleva du milieu des flots et m'apporta ici près de vous. »
Quant aux disciples qui avaient quitté ce monde (f. 161, a), ils rapportèrent comment ils étaient sortis de leurs tombeaux et comment une nuée les avait enlevés et déposés à cet endroit. Barthélemy dit alors : « J'étais dans un lieu où je priais et me réjouissais, quand l'Esprit-Saint me dit : "La Mère de ton Seigneur veut quitter ce monde ; va à Bethléem." Et à l'instant une nuée m'enleva et m'apporta en ce lieu. » Les disciples ajoutèrent tous : « Cette parole sainte concerne sainte Marie. »
La Dame pure leva alors sa main vers le ciel et dit : « Je te bénis, ô mon Seigneur et mon Dieu, je te loue, je t'adore, ô Saint, de ce que tu as regardé la pauvreté de ta Mère et lui as manifesté des prodiges, ô Puissant qui peux faire tout ce que tu veux. Désormais, toutes les mères me proclameront bienheureuse (1). »
Quand elle eut fini de prier, elle dit à tous les disciples : « Apportez des encensoirs et de l'encens et invoquez Notre-Seigneur Jésus-Christ. » Ils obéirent, et quand ils eurent prié, ils entendirent un grand bruit de tonnerre qui venait du ciel ; ils virent une lumière éblouissante et ils entendirent comme (f. 161, b) un bruit de cavaliers avec des légions d'anges et d'archanges. Puis ils entendirent la voix du Fils de l'homme, tandis que les chérubins et les séraphins entouraient la maison où se trouvait la sainte Mère de notre Dieu avec tous les disciples.
Cependant, le chef que le gouverneur avait envoyé vint à Bethléem, mais il ne trouva ni les disciples, ni la Vierge sainte et pure. Il se montra sévère envers les habitants de Bethléem et leur dit : « C'est vous qui êtes allés trouver le gouverneur et les princes (f. 163, b) des prêtres et les Juifs, et leur avez appris les miracles et les prodiges qui s'opéraient : vous les avez informés que l'on venait de tous côtés à Bethléem et vous leur avez indiqué où se trouvaient les disciples. Allez donc trouver le gouverneur et faites-lui savoir ce que vous avez dit. »
Or, le chef ignorait que les disciples étaient allés à Jérusalem par la puissance de Notre-Seigneur Jésus-Christ. Il prit les Bethléémites et les emmena chez le gouverneur, et l'informa qu'il n'avait trouvé aucun de ceux dont ils avaient parlé. Cinq jours après, le gouverneur et les princes des prêtres apprirent que la Mère de Jésus de Nazareth était dans sa demeure avec tous les disciples, et que de nombreux prodiges avaient fait connaître sa présence à Jérusalem. Des hommes et des vierges répétaient : « Sainte de Dieu, ô Mère pure de Notre-Seigneur Jésus-Christ, ne nous abandonnez pas. »
La colère des Juifs et de leurs chefs redoubla : ils se levèrent aussitôt et prirent du feu et du bois pour aller brûler la maison où se trouvait Notre-Dame avec les saints disciples et les autres fidèles qui étaient avec eux. Le gouverneur se tint (f. 164, a) à l'écart pour voir ce qu'allaient faire les Juifs. Au moment où ces impies, insolents et cruels, arrivaient à la porte de la maison où se trouvait Notre-Dame, la sainte Mère de lumière, un grand feu s'en échappa et des anges apparurent. La plupart furent brûlés et les autres s'enfuirent épouvantés.
Une grande terreur s'empara des habitants de Jérusalem et de tous ceux qui s'y trouvaient, et le gouverneur, voyant ce qui leur était arrivé, devint tout tremblant et fut saisi d'une grande frayeur. Les fidèles louèrent Notre-Seigneur et Dieu, Jésus-Christ, né de la pure et sainte Vierge Marie.
Le gouverneur s'écria à haute voix : « En vérité, ô Marie, ô pure Vierge, celui qui est né de toi est saint et il est réellement le Fils de Dieu. Nous avons voulu te chasser et te faire sortir de notre ville, et nous avons été témoins de tels prodiges et de tels signes qu'ils ne peuvent être accomplis que par la puissance du Fils de Dieu. »
Une violente scission se produisit chez les Juifs et un grand nombre d'entre eux crurent au nom de Notre-Seigneur Jésus-Christ à cause des miracles qu'ils avaient vus accomplir par Notre-Dame, la pure Vierge Marie, et par les saints disciples. (fol. 164, b)
Le jour où le Saint-Esprit annonça à Notre-Dame la venue des disciples, était un dimanche. Ce fut également un dimanche que Gabriel, l'ange saint, lui annonça que le Christ, le Verbe de Dieu, descendrait en elle. Ce fut un dimanche qu'il naquit à Bethléem. Ce fut un dimanche que les enfants de Jérusalem vinrent avec des rameaux à la rencontre du Christ, Notre-Seigneur, en disant : « Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur (1). » Ce fut un dimanche que Notre-Seigneur et Sauveur Jésus-Christ (à Lui la gloire !) ressuscita d'entre les morts. Ce fut un dimanche que le Saint-Esprit descendit sur les saints disciples, comme il le leur avait promis. Ce fut aussi le jour du dimanche qu'il vint honorer sa Mère au moment où son âme quittait ce monde.
Quand donc le jour du dimanche fut arrivé, la pure Vierge Marie dit aux saints disciples : « Mettez de l'encens dans les encensoirs et priez, parce que Notre-Seigneur Jésus-Christ va venir avec ses anges saints. »
Elle leur parlait encore, et ils venaient de mettre de l'encens dans les encensoirs, quand Notre-Seigneur arriva avec les anges purs, porté par les Chérubins et les Séraphins. Une multitude innombrable d'anges l'accompagnait, et l'on vit une lumière éclatante et de grands prodiges. (fol. 165, a)
Au moment où son Fils et son Dieu apparaissait, les légions angéliques et les disciples se prosternèrent devant elle et devant son Fils, Notre-Seigneur et Dieu Jésus-Christ (à Lui la gloire !). La sainte Vierge Marie fut inondée de joie et s'écria : « Me voici, ô mon Seigneur et mon Fils bien-aimé. » Il lui répondit : « Réjouis-toi et tressaille d'allégresse, ô ma Mère, et que ton âme soit dans la joie et le bonheur, car tu obtiendras près de moi une grande faveur : vois quelle gloire et quels hommages mon Père m'a accordés ! »
Notre-Dame regarda alors la grande lumière dont la langue de l'homme ne peut parler et que personne ne peut comprendre. Notre-Seigneur Jésus-Christ (à Lui la gloire !) lui dit ensuite : « Je vais maintenant transporter ton corps au Paradis, et ton âme sainte habitera aux cieux, dans les demeures de mon Père qui sont remplies de lumière, de joie et d'allégresse, où se trouve le salut et le repos éternel et sans fin dont les anges sont inondés. »
La pure et sainte Marie dit alors : « Ô mon Seigneur et mon Dieu, étends ta main pure et bénis-moi. » Et le Sauveur étendit sur elle sa main vénérable et la bénit. Elle prit la main droite de son divin Fils, la baisa et lui dit : « J'adore cette main qui (fol. 165, b) a formé notre père Adam, qui a créé les cieux et la terre. Je te supplie, ô Roi des Rois, ô Fils du Dieu unique, qui as daigné prendre un corps dans le sein de ton humble Mère pour sauver les hommes, de m'accorder, par une disposition de ta Providence, la demande que je te fais en ce moment : c'est d'exaucer par ta Toute-Puissance quiconque t'invoquera et te priera en mon nom et par mon intercession, car je suis ta Mère ; de le combler de ta miséricorde et de lui accorder tout ce qu'il te demandera, parce que tu peux tout ce que tu veux. »
Les apôtres, l'entendant parler à son Seigneur, se prosternèrent à ses pieds et lui dirent : « Ô Mère de notre Dieu et Seigneur, laisse ta bénédiction en ce monde avant de le quitter. » La Vierge pure, Mère de Notre-Seigneur Jésus-Christ, pria alors en ces termes : « Ô Dieu, Père de Notre-Seigneur et Dieu, Jésus-Christ, qui dans ta bonté et l'excès de ta miséricorde, as voulu envoyer ton Fils unique dans le monde, et qui l'as fait habiter dans mes entrailles pendant neuf mois, et as daigné le faire s'incarner en moi, aie pitié de ta créature et de toute âme qui louera ton Nom glorieux et saint. »
Elle ajouta encore cette prière : « Ô Jésus, Fils du Dieu qui a tout pouvoir (fol. 166, a) dans les cieux et sur la terre, accorde ta bénédiction à tout lieu où l'on invoquera ton nom et le mien en même temps que le nom de ton Père plein de bonté et du Saint-Esprit. Chaque fois qu'on y célébrera ton nom, ainsi que le nom de ton Père et du Saint-Esprit, et celui de ta Mère, exauce ma demande, ô mon Roi et mon Dieu. Bénis tout lieu où les chrétiens fidèles invoqueront ton nom, suivant la foi orthodoxe ; agrée, ô Seigneur, leurs jeûnes, leurs prières, leurs offrandes et leurs holocaustes. Que quiconque te fera une offrande en mon nom obtienne de toi, Seigneur, le pardon de ses péchés et la remise de tout le mal et de toutes les fautes qu'il a commises. »
Notre-Seigneur Jésus-Christ (à Lui la gloire !) lui répondit : « Il en sera comme tu viens de dire, et j'accomplirai ta demande. Réjouis-toi, ô pleine de grâce, en qui se trouve tout don parfait, je t'accorderai, de la part de mon Père, tout ce que tu me demanderas, et quiconque aura recours à toi et invoquera ton nom ne sera pas déçu dans ce monde ni dans l'autre, et il sera accueilli avec faveur par mon Père qui est dans les cieux. »
Ensuite, Notre-Seigneur se tourna vers Pierre et lui dit : « Le moment est venu ; mets-toi en prière et chante les louanges de Dieu. » Pierre se mit donc à prier, et les anges lui répondaient, (fol. 166, b) louant et sanctifiant le nom de Dieu.
À ce moment, le visage de la bienheureuse resplendit d'une lumière éclatante ; puis elle bénit de sa main, les uns après les autres, tous les saints apôtres qui étaient présents. Alors, Notre-Seigneur Jésus-Christ étendit sa main sacrée vers la sainte et pure Vierge Marie et il reçut son âme sainte, glorieuse et pure. Que son intercession reste avec nous ! Amen.
Au moment où l'âme de la Bienheureuse sortit de son corps, le lieu où ils étaient fut rempli d'une grande lumière, et une odeur suave se répandit, telle qu'on n'en peut sentir de plus agréable. Une voix se fit entendre des cieux, elle disait : « Heureuse es-tu, ô reine bénie entre toutes les femmes, mère du Roi des Rois et de Celui qui les a créés. »
Pierre se prosterna alors avec tous les saints apôtres devant le saint corps ; ils l'enveloppèrent de linceuls précieux et l'ensevelirent comme il convenait à sa dignité, et selon ce que le Fils unique leur avait prescrit. Ils la déposèrent dans un cercueil magnifique. Puis les disciples la portèrent sur leurs épaules et se dirigèrent vers le cimetière.
Pendant qu'ils la transportaient ainsi, ils rencontrèrent un Juif nommé Théophane (Tdoufina). C'était (fol. 167, a) un homme violent et robuste. Il saisit la bière dans laquelle était la bienheureuse Vierge Marie pour la faire tomber de dessus les épaules des disciples, comme les Juifs impies le lui avaient recommandé, afin de brûler le saint corps. Mais un ange du Seigneur le frappa d'une épée de feu, lui coupa les deux mains et les détacha des bras. Le cercueil se releva aussitôt, et les deux mains du Juif y restèrent suspendues.
Quand les Juifs qui étaient présents virent cela et se rendirent compte de ce prodige, ils s'écrièrent : « Celui qui est né de toi est vraiment le Fils de Dieu qui est venu dans le monde, et il est véritablement Dieu, ô sainte Marie. » Théophane s'écria de son côté : « Ô sainte Marie, Mère du Christ, aie pitié de moi ! » Pierre lui dit : « Crois-tu au Fils de Dieu, le Christ, qui est né d'elle ? » Il répondit : « Oui, je crois en Lui. »
Et Pierre, notre Père, dit aux deux mains coupées : « Au nom de Jésus-Christ, Fils de Dieu, né de la Vierge pure, retournez à votre place et restez-y attachées comme auparavant. » Au moment où Pierre prononçait ces paroles, les deux mains se détachèrent du cercueil, à la vue de tous les assistants, et revinrent se fixer à leur place comme auparavant. Et Théophane, avec tous les Juifs présents, crut alors. (fol. 167, b)
Quand ce miracle fut accompli, Pierre, notre Père, donna à Théophane un bâton desséché et lui dit : « Va maintenant et ne pèche plus. Montre aux yeux des Juifs la puissance de Dieu, au moyen de cette verge, et fais-leur connaître leur faiblesse devant la puissance de Dieu et leur ignorance devant la sagesse des jugements de Dieu à leur égard. Raconte-leur ce que Dieu t'a fait et les faveurs dont il t'a comblé, afin que ceux qui n'étaient pas là sachent que la doctrine que nous prêchons vient de Celui qui gouverne le ciel et la terre, et non des hommes, et qu'ils s'abstiennent de pensées mauvaises et de paroles déshonnêtes qui ne leur profitent point, mais qui causent leur perte sans qu'ils obtiennent ce qu'ils se proposent. »
Théophane prit donc à la main le bâton desséché et retourna vers les Juifs. Quand il fut arrivé à la porte de la ville, il la frappa de sa verge, et aussitôt celle-ci se couvrit de feuilles dans sa main, et il bénit Dieu (magnifié soit son nom !) en disant : « Cette verge est plus excellente que celle d'Aaron. »
Les Juifs lui dirent : « Qu'as-tu donc, insensé, et que t'est-il arrivé ? Les disciples du crucifié et sa mère t'ont-ils séduit (fol. 168, a) au point que tu sois devenu l'un des leurs ? »
Pendant qu'ils lui parlaient ainsi, un aveugle survint. Théophane lui posa sa verge sur les yeux et dit : « Au nom du Christ crucifié, que tes yeux s'ouvrent. » Et ses yeux s'ouvrirent au même moment ; tous les malades et les infirmes sur lesquels il la mettait étaient guéris à l'instant de leurs infirmités, quelles qu'elles fussent. En voyant cela, les Juifs furent stupéfaits et remplis d'admiration, et un grand nombre d'entre eux crurent. Ils disaient : « En vérité, cette doctrine est vraie et cette puissance vient du ciel. »
Mais les prêtres des Juifs furent irrités, et leur fureur fut extrême ; ils empêchaient les foules de se convertir. Cependant, les purs disciples, portant le saint corps, se dirigèrent vers le cimetière, au bas de la vallée, vers une grotte où se trouvait un sépulcre neuf. C'était Jésus-Christ lui-même qui leur avait indiqué ce lieu.
Ils y déposèrent le saint corps et mirent une pierre à l'entrée du sépulcre, glorieux. Puis ils se levèrent et se mirent à prier et à célébrer les louanges de Dieu, de Notre-Seigneur Jésus-Christ et du Saint-Esprit. Les disciples restèrent là (fol. 168, b) trois jours et trois nuits en prière, s'humiliant devant le Dieu Très-Haut (louange à Lui !).
Cependant, Thomas, l'un des Douze, surnommé le Jumeau, n'était pas présent avec les disciples au moment où l'âme de Notre-Dame, Marie, la Vierge pure, quitta son corps. Il venait des extrémités de l'Inde, sur une nuée, quand il vit le saint corps, porté par les anges sur les nuées, s'élever au ciel avec une grande gloire. Il lui demanda sa bénédiction.
Quand il fut arrivé au milieu des disciples, Pierre lui demanda : « Qui t'a appris la dormition de la Mère de notre Dieu et sa sortie de ce monde ? » Thomas leur dit : « La Mère de notre Seigneur et Dieu n'est pas morte, si ce que j'ai vu est vrai. »
Les disciples lui dirent : « Tu as déjà dit, quand Notre-Seigneur Jésus-Christ est ressuscité des morts : Je ne croirai point que le Christ est ressuscité, tant que je ne verrai point les traces des clous dans ses mains et ses pieds, et la blessure de la lance dans son côté. Le Seigneur fut pour toi plein de bonté et de condescendance : il te montra ses plaies et tu t'écrias : Mon Seigneur et mon Dieu. » (fol. 169, a)
Thomas leur dit : « Vous savez que je suis Thomas ; je ne croirai pas et je ne serai pas satisfait à moins d'avoir vu de mes yeux le tombeau dans lequel vous avez enseveli la Vierge pure ; sinon, je ne croirai point. »
Pierre se leva alors avec tous les saints disciples ; ils allèrent au tombeau et l'ouvrirent pour montrer le saint corps, mais ils ne trouvèrent rien. Ils furent stupéfaits et remplis d'un grand étonnement. Thomas leur dit alors : « En vérité, je vous le dis, mes frères, quand je prêchais la grâce du Christ, au moment où je baptisais le neveu du roi, Philaous (Philaos), l'Esprit-Saint me dit tout à coup : Lève-toi, Thomas, et va saluer le corps pur de la Mère de Vie, sainte Marie, Mère de Notre-Seigneur. Et une nuée m'enleva sur-le-champ et m'apporta vers vous en ce lieu. Pendant que j'étais sur la nuée, je vis le saint corps entouré d'anges qui chantaient des hymnes et des louanges spirituelles, pendant qu'ils le portaient aux cieux. »
(fol. 169, b) Dès qu'ils eurent entendu ces paroles de Thomas, les disciples louèrent Dieu avec enthousiasme ; ils magnifièrent Notre-Seigneur Jésus-Christ et sanctifièrent le nom de l'Esprit-Saint. À ce moment, douze nuées de feu s'approchèrent d'eux et les emportèrent au Paradis, au lieu où était monté le corps pur de la sainte Vierge Marie.
Ils le contemplèrent et virent en même temps Jean-Baptiste, Anne, mère de Notre-Dame sainte Marie, Abraham, Isaac et Jacob, les saints Patriarches, qui étaient prosternés devant le saint corps et qui louaient, en accents merveilleux, Notre-Seigneur Jésus-Christ, né de la Vierge pure, et son Père, le Dieu de bonté, et l'Esprit-Saint dont la miséricorde n'a point de bornes. Personne ne peut décrire sa gloire, ni la douceur des accents par lesquels les saints la célèbrent.
Nous louâmes aussi alors, nous les disciples, Notre-Seigneur Jésus-Christ qui nous a comblés de faveurs et nous a montré ces prodiges au moment de l'assomption du corps pur à la vie éternelle et au Paradis qui ne finira point.
Quant à nous, nous prions notre Seigneur et Dieu Jésus-Christ par l'intercession (fol. 170, a) de Notre-Dame, la Vierge pure et choisie, qu'il nous garde de sa main protectrice, qu'il nous donne la force et la grâce en ce monde, et que sa miséricorde nous assure le pardon de nos péchés dans l'autre, afin que nous le louions en tout temps et en tout lieu, Lui le Fils unique, né du Père, né à la fin des temps de la sainte et pure Vierge Marie.
Gloire à Lui et que sa miséricorde soit sur nous dans l'éternité !
La Dormition de Notre-Dame, la Vierge pure et élue qui intercède pour les pécheurs, l'excellente choisie dans tout le genre humain, sainte Marie, la gloire des habitants des cieux et de la terre, eut lieu le vingt et unième jour du mois de Toubah, en même temps que son ascension aux demeures lumineuses d'en-haut et l'assomption de son corps pur dans le Paradis.
Que ses prières, sa bénédiction et son intercession nous sauvent de toutes les tentations de l'ennemi malin et perfide, et qu'elles gardent tous les orthodoxes qui croient (fol. 170, b) à la sainte Trinité. Que le Seigneur nous pardonne nos péchés et nous accorde le salut de nos âmes. Qu'il nous dirige dans toutes nos affaires et qu'il nous rende propices les cœurs de ceux qui nous sont préposés ; qu'il nous bénisse dans nos biens et dans les œuvres de nos mains ; qu'il n'abrège pas la durée de notre vie, parce que nous n'avons pas d'autre moyen de salut que de nous confier à Lui et de recourir à la grâce, à la bonté et à la charité du Père, du Fils et du Saint-Esprit, maintenant, en tout temps et dans les siècles des siècles. Amen. Amen.
Souviens-toi, Seigneur, de ton serviteur, le pauvre pécheur plongé dans la mer de ses péchés et de ses fautes, qui a transcrit ce livre : souviens-toi aussi, Seigneur, de tes serviteurs qui s'y intéresseront. Quiconque le lira et le citera obtiendra en récompense trente, soixante et cent pour un, selon ce que Notre-Seigneur a promis dans son saint Évangile. Amen. Amen. Amen.